Tout d’abord, qu’est-ce qu’un « tiers-lieu » ?
Aurélien Denaes : Cela fait dix ans que j’accompagne des projets dans l’économie sociale et solidaire. Et jusqu’à récemment chez A+, c’est mieux, nous ne voulions pas normer ce genre de lieux, qui évoluent en fonction des réflexions. Mais, ces derniers mois, nous avons changé d’avis. Le Robert en a même donné une définition très concrète qu’on aime beaucoup car elle inclut les notions d’espace de sociabilité et d’initiatives citoyennes. Un tiers-lieu pour nous, c’est une sorte de bazar, un bordel organisé qui souvent finit par échapper à ses fondateurs – dans le bon sens du terme -, un espace d’échange et de rencontre qui s’appuie sur la coopération entre les habitants qui vivent autour. On peut y proposer toutes sortes d’usages, qui vont de la restauration à l’artisanat en passant par l’hébergement d’urgence. Ce sont aussi des endroits où les gens se mélangent plus qu’ailleurs.
Y a-t-il un besoin de nouveaux lieux de rencontre ?
Pendant l’entre-deux-guerres, il y avait 500 000 cafés en France et encore 200 000 dans les années 1960. Dans les années 2010, on est tombé à environ 40 000. Et les zones rurales sont les plus touchées par cette baisse. Avec ces fermetures de cafés, ce sont des espaces de rencontres et d’échange qui ont disparu. Les tiers-lieux permettent de contrer ce phénomène. De notre point de vue, c’est le meilleur moyen de se coordonner pour redonner vie à une localité. Le tiers-lieu permet de se retrouver, d’imaginer des projets ensemble. On en compte 2500 en France et 450 en Île-de-France, même si en Île-de-France tous ne font pas leur travail de sociabilisation et se contentent d’exister en tant que « coworking ».
Les tiers-lieux ne sont donc pas l’apanage des villes…
Il est vrai que les tiers-lieux ont été conceptualisés en milieu urbain mais aujourd’hui, on en trouve de plus en plus dans les zones rurales, ce qui peut être une source d’inspiration pour la grande couronne francilienne où l’enjeu est de créer de la sociabilité pour contrer le fameux effet cité-dortoir. C’est cela que nous voulons montrer chez A+, c’est mieux.
Justement, qu’est-ce qu’A+, c’est mieux ?
Nous avons créé l’association il y a un an et demi à la fois pour défendre le concept de tiers-lieu, réfléchir à de nouvelles idées, organiser des rencontres mais aussi aider les porteurs de projets qui le souhaitent. Il est important que cette dynamique ne se limite pas à un cercle fermé. C’est d’ailleurs la raison d’être de notre CycloTour fin août. Il sera l’occasion de faire se rencontrer les animateurs de ces lieux avec ceux qui cherchent à s’en inspirer.
Quel sera le programme de ce CycloTour des tiers-lieux ?
Nous allons nous déplacer pendant trois jours à travers le Sud francilien pour y découvrir 11 tiers-lieux et rencontrer leurs fondateurs. Nous échangerons également avec les représentants du Parc régional de la Haute Vallée de Chevreuse (Yvelines / Essonne) qui proposent un accompagnement à destination des créateurs de tiers-lieux, que ce soit pour les aider à trouver des financements ou leur partager des bonnes pratiques. Le samedi 27 août, nous ferons halte à Saint-Jardin, un éco-lieu à Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Yvelines). Nous y proposerons des temps de réflexion et la journée s’achèvera par un repas contributif et un « sleep concert ». Pour ceux qui le souhaitent, il sera possible de dormir sur place, en tente ou à l’intérieur. Idem pour le premier soir, vendredi 26 août, que nous passerons dans un monastère.
Quels sont pour vous les tiers-lieux emblématiques du Grand Paris ?
Je ne veux pas retenir de tiers-lieux emblématiques. On combat l’idée des cathédrales qui concentrent l’attention. Notre but est plutôt de montrer la diversité. Ce que nous allons faire avec le CycloTour.
Infos pratiques : « Les tiers-lieux à vélo » du vendredi 26 au dimanche 28 août, parcours de 70 km (pour moitié sur des pistes cyclables) dans le sud francilien pour y découvrir 11 tiers-lieux. Tarifs : à partir de 20 €. Infos et inscription sur apluscestmieux.org
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6 août 2022