Il y a un an tout juste, l'Ecodesign fab lab ouvrait ses portes sur les toits de l'usine Mozinor. Ici, machines (imprimantes 3D, fraiseuse laser, marteau, etc.) et matières premières (uniquement de récupération) sont mises à disposition des bricoleurs du dimanche comme des aficionados du «Do it yourself». Au programme création d'objets, upcycling et économie circulaire...
Mozinor, bloc industriel de 42 000 m² sculpté dans le béton armé, s’impose quelque peu dans le paysage montreuillois. A son sommet, une immense étendue d’herbe qui tutoie les cieux et sur laquelle se dresse un bâtiment. C’est là, sur « le toit du Grand Paris » (vue imprenable), que se niche, depuis février 2014, l’Ecodesign fablab.
Installé par l’Association des professionnels de l’écodesign et de l’écoconception (Apedec), ce lieu s’inscrit pleinement dans la mouvance des fabrication laboratories (fablab), concept né aux Etats-Unis au sein du MIT (Massachusetts Institue of technology). Ce sont des espaces ouverts à tous et collaboratifs, dotés de machines généralement dédiées à la fabrication numérique. L’idée : créer plutôt que consommer.
Du marteau à la 3D
La porte du fab lab montreuillois s’ouvre sur un atelier. Un champ des possibles ! Ici un établi, des ordinateurs et une imprimante 3D, là-bas, la découpeuse laser, la fraiseuse, le marteau… Tout ce qu’il faut, en somme, pour s’essayer au design et concevoir des objets divers et variés. Et que vous soyez un pape du « Fais-le toi même » ou simple curieux, « l’atelier est ouvert à tout le monde à partir de 14 ans chaque jeudi et vendredi », souligne Philippe Schiesser, président de l’Apedec.
Si, comme pour nous, la perceuse, c’est « Fastoche, les gars ! Je sais faire », la scie verticale vous rend un peu moins téméraire. Quant à l’imprimante 3D qui permet de faire à peu près tout et n’importe quoi, c’est de la science-fiction. Mais rassurez-vous, vous n’êtes jamais lâché seul dans la jungle – parfois hostile – des outils. « Un fabmanager est là pour conseiller et accompagner le public. Certaines machines type raboteuse, scie circulaire, scie plongeante, perceuse à colonne, etc. nécessitent une formation obligatoire et payante de 100 euros ».
Chaises, tables basses, cheval à bascule, luminaire… « Tout dépend de son niveau et de la pièce que l’on souhaite réaliser mais il est tout à fait possible de concevoir un objet en une journée…», assure Philippe. Ce jour-là, des étudiants « Géo Trouvetou » occupent l’espace pour un workshop. Certains s’affairent à conceptualiser sur les ordinateurs tandis que d’autres, perceuse et marteau à la main, fabriquent un prototype de glacière qui fonctionnera à l’énergie solaire. Ambiance studieuse et odeur de sciure. A noter que les lieux abritent un vaste espace de coworking et accueillent des professionnels (artistes, designers, etc.).
Upcycling
Ça bricole donc sévère du côté de Mozinor mais ça bricole responsable. A l’écodesign fab lab, il n’y a pas que la scie qui est circulaire… l’économie aussi. Ici, rien ne se perd, tout se transforme. « Mozinor compte aujourd’hui une cinquantaine d’entreprises qui génèrent, chaque année, 3 000 tonnes de déchets. Quand j’ai installé mes bureaux ici il y a quelques années (Philippe est par ailleurs à la tête d’un bureau d’étude d’éco-conception, NDLR), je me suis demandé comment utiliser ce gisement ». Ainsi les matériaux rejetés (essentiellement du bois mais aussi du plastique et du plexiglas) constituent-ils la matière première mise à disposition du public gratuitement.
Alors ? Vous l’imaginez déjà. Cet objet « écodesigné » qui trône au milieu de votre salon. Cette pièce unique que l’on vous enviera à coup sûr et dont vous tirerez fierté : « c’est moi qui l’ai fait ! »
Enfin, si vous êtes pris de convulsion à la vue d’outils, permettez-nous d’enfoncer le clou : Mozinor vaut tout de même le détour. Géant architectural des 70’ies, cette zone industrielle – conçue pour que les unités de production soient les unes au-dessus des autres et reliées par une « autoroute » intérieure – est la première usine verticale d’Europe. Il se raconte, par ailleurs, que dans les années 1990, alors que la zone tournaient au ralenti, les toits de Mozinor ont accueilli de mémorables rave parties. Les raves sont parties mais le rêve, lui, est resté.
16 février 2015 - Montreuil