
Pour sa 8e édition, la biennale des métiers d'art et du design Émergences rassemble durant 4 jours, du 10 au 13 avril, la fine fleur de la création du 93 et d'ailleurs au Centre national de la danse à Pantin. Un événement ouvert à tous gratuitement.
En partenariat avec Est Ensemble
Ce sont d’étonnants blocs de béton dans lesquels ont été moulées des curiosités architecturales. Ici, un escalier évoquant une villa gallo-romaine voisine avec une fenêtre rappelant Le Corbusier. Il y a des excavations, des recoins, des niches, des voûtes… En tout, 99 rectangles qui constituent un ensemble épatant. Un peu comme si La Vie mode d’emploi de Georges Perec avait fusionné avec un précis d’architecture. Ou comme si on avait confié la conception d’une maison de poupée géante à un designer déjanté qui aurait cherché à mixer, dans sa construction, tous les styles, toutes les époques. Jules Goliath, auteur de cette installation, préfère parler de « caprice » : un procédé en peinture qui consiste à représenter des paysages imaginaires.
Fragmentale Intra-Muros – tel est le nom de l’œuvre – est son travail de fin d’études aux Beaux-Arts et sera présenté à la biennale Émergences qui se tiendra du 10 au 13 avril prochain au Centre national de la danse (CND) à Pantin (Seine-Saint-Denis). « Un bel endroit pour exposer » avec son architecture brutaliste qui constitue comme « une mise en abyme » avec son propre travail décrit Jules Goliath. Ce matin de mars, dans son atelier de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis), le jeune homme s’enthousiasme aussi de « partager la scène avec tous les types de métiers d’art. Cela constitue un bon lieu de rencontre, où les techniques et les savoir-faire s’échangent ». Designer, Jean-Baptiste Durand qui œuvre du côté de Montreuil (Seine-Saint-Denis) se dit pour sa part « flatté de se retrouver invité au milieu de tant de personnalités talentueuses. Je le vois comme un privilège ».

Montrer que le 93 est un poumon créatif du Grand Paris
Ils sont en effet 56 artisans d’art – designers, tapissiers, ébénistes… – à avoir été sélectionnés pour participer à cette huitième édition de la Biennale intitulée « 9 ter ». Un nom comme un clin d’œil à la Seine-Saint-Denis – le fameux 9-3 – puisque « 70 % des artistes présents travaillent sur le territoire de la communauté d’agglomération d’Est Ensemble », précise Helena Ichbiah, co-commissaire avec Véronique Maire de l’événement. « Il s’agit de montrer que ces neuf villes [parmi lesquelles Montreuil, Pantin, Romainville, Noisy-le-Sec, ndlr] constituent un poumon créatif du Grand Paris. »
Si auparavant la Biennale avait des airs de Salon, les deux commissaires ont souhaité lui donner davantage l’aspect d’une exposition. « L’idée est de faire voir du beau et de montrer la porosité des pratiques. Que le public en prenne plein les yeux ! Avec le souci de la transmission », promet Helena Ichbiah. De fait, durant les quatre jours, des ateliers gratuits seront proposés au public afin de découvrir différentes techniques comme la construction en pierre ou l’ébénisterie. De quoi potentiellement susciter des vocations chez les plus jeunes.
La manifestation se découpe en six grandes thématiques. Parmi celles-ci, « Ouvrage moderne » propose une remise au goût du jour de l’artisanat traditionnel. L’occasion de découvrir, notamment, la table Twirl de Grégory Lacoua dont le pied s’apparente aux racines sinueuses d’un arbre. Dans la section « Nature crue », la céramiste pantinoise Julie Bergeron propose des vases qui semblent échappés du palais de la Petite Sirène. Avec « Nouvelle Excellence », c’est la minutie et le geste de haute voltige qui sont mis en avant. On y retrouvera Quentin Vuong qui présentera After the rain, collection de mobilier sur lequel des gouttes de résine donnent l’impression que des gouttes de pluie se sont attardées sur les chaises et les tables. « Super simple » met à l’honneur le fameux « less is more » à l’instar de Cesar Bazaar qui propose des carreaux de papier, cousins contemporains des azulejos portugais. Jean-Baptiste Durand et Jules Goliath voisinent dans la section « Futur Archaïque » qui regarde vers demain. Jean-Baptiste Durand présente notamment sa chaise Nascar, inspirée des sports mécaniques ou encore son fauteuil Hyperbeast qu’on imagine bien dans le salon de Terminator. Enfin « Non standard » interroge la notion de conception en série. Ébéniste et designer, Jonathan Cohen expose ses meubles dont les impressions ont été réalisées au tampon.

« Une édition très riche et très surprenante »
« C’est une édition très riche et très surprenante, souligne Helena Ichbiah, avec beaucoup de pièces créées pour l’occasion. » La commissaire se félicite aussi de la jeunesse des exposants et du fait que, pour ces artistes sélectionnés, « l’écoconception n’est plus un débat ». Pour ses carreaux de papier, Cesar Bazaar s’appuie sur des papiers collectés par Lemon Tri, entreprise de recyclage située à Pantin. Quant à Jules Goliath, il utilise pour son travail du béton dans lequel le ciment est remplacé par… des cendres. Dans son atelier, un gros bloc attend visiblement d’être utilisé. Lui attend avec impatience la Biennale, « pour la rencontre avec le public. Parler de mon travail avec les gens, c’est une bonne façon de stimuler mon imaginaire, de me mettre sur de nouvelles pistes pour la suite de ma recherche ». Jean-Baptiste Durand voit cette participation comme une bonne façon de remettre du carburant dans le moteur de sa motivation : « Plein de fois, je me suis dit que j’allais arrêter parce que c’est un peu usant. Aussi qu’on reconnaisse mon travail, qu’on s’attarde dessus, c’est une forme de soutien. » Rendez-vous du 10 au 13 avril prochain pour lui apporter le vôtre !
Infos pratiques : Biennale Émergences au Centre national de la danse, 1, rue Victor Hugo, Pantin (93). De 8 h à 22 h le jeudi 10 et le vendredi 11 avril, de 11 h à 20 h le samedi 12 avril, de 10 h à 18 h le dimanche 13 avril. Entrée libre. Accès : métro Hoche (ligne 5) ou gare de Pantin (RER E). Plus d’infos sur emergences-biennale.fr
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23 mars 2025 - Pantin