
Né en Angleterre, « Demandez Angela » va être déployé à Montreuil afin de permettre aux victimes de harcèlement de rue de trouver facilement un refuge. Ce que détaille à Enlarge your Paris Loline Bertin, adjointe au maire déléguée à la tranquillité publique.
Le dispositif « Demandez Angela » a vu le jour en Angleterre. Pouvez-vous nous expliquer en quoi il consiste ?
Loline Bertin : Effectivement, le dispositif a émergé dans les pays anglo-saxons. L’idée est de constituer un réseau de lieux publics et privés (bars, commerces, lieux culturels, associations…) qui s’engagent à accueillir et soutenir les personnes victimes de harcèlement de rue. Ces lieux bénéficieront d’un affichage de type sticker qui permettra aux victimes potentielles de savoir qu’elles peuvent s’y réfugier. En mettant en place « Demandez Angela », l’idée est de prendre acte qu’en France, huit femmes sur dix se disent victimes du harcèlement de rue. Certaines femmes vont jusqu’à modifier leur trajet pour éviter un endroit qui leur paraît hostile, voire qui s’abstiennent de sortir le soir. Pour Patrice Bessac, le maire, Baptiste Perreau, conseiller municipal missionné au développement des cultures urbaines et à la vie nocturne, et moi-même, c’est aussi une bataille culturelle : le harcèlement de rue est interdit par la loi et à Montreuil, on se mobilise contre.
Concrètement, que peuvent attendre les personnes qui solliciteront les lieux membres du réseau ?
Elles seront au contact de gens sensibilisés au sujet. En effet, le personnel et les gérants des lieux inscrits dans le réseau seront formés à les accueillir. Ils sauront reconnaître le ressenti, les émotions de la personne, sans minimiser la situation. Ils lui permettront de se sentir en sécurité, de reprendre son souffle. Cela peut passer par l’offre d’un verre d’eau, la possibilité de recharger son téléphone. Et ils pourront contacter pour elle les forces de l’ordre si nécessaire. En fait, tout dépend de ce que demandera la victime. Un temps de repos jusqu’à la mise en contact avec les autorités. En tout cas, s’il est initialement axé sur les femmes victimes de harcèlement de rue, le dispositif est destiné à toutes les personnes victimes de discrimination, qu’il s’agisse de membres de la communauté LGBT, de personnes porteuses de handicap ou de personnes âgées par exemple.
Est-ce que des particuliers qui souhaiteraient ouvrir leur maison pour accueillir des victimes peuvent postuler au réseau « Demandez Angela » ?
Pour l’instant, c’est plutôt réservé aux professionnels. Car il faut que les lieux soient ouverts sur l’espace public. D’autant qu’il est difficile de savoir si un particulier sera chez lui ou non. Notre ambition est de réussir à avoir une belle couverture géographique car Montreuil est une ville assez étendue. Nous voudrions pouvoir créer des safe places un peu partout sur le territoire.
Justement, où en êtes-vous pour le moment ?
Nous avons ouvert l’appel à candidatures et une première vague de formation démarrera dès le mois prochain. Cela permettra de déployer le dispositif dans la foulée. D’ici deux mois, nous aurons donc les premières structures estampillées « Demandez Angela ». Pour l’instant, nous avons des retours très positifs avec des candidatures de bars, de commerces, de restaurants ainsi que de bibliothèques ou de cinémas.
On peut qualifier « Demandez Angela » de dispositif d’urgence de lutte contre le harcèlement de rue. Qu’en est-il de la prévention ?
La ville est très mobilisée sur ces questions. Nous avons développé des principes d’éducation non genrée dans nos crèches et centres de loisirs. Nous formons les professionnels qui sont au contact des enfants et nous travaillons aussi sur le réaménagement des cours d’école car, finalement, partager une cour d’école aujourd’hui prépare à la façon dont on partagera l’espace public demain. Dans nos antennes jeunesse – donc plutôt destinées au public collégien –, on aborde la question du consentement et du respect de l’autre. Nous nous situons donc dans une approche très transversale. Avec un but : qu’un jour, le dispositif « Demandez Angela » ne soit plus nécessaire.
Infos pratiques : si vous êtes intéressé en tant que lieu montreuillois pour prendre part au réseau « Demandez Angela », toutes les informations sont disponibles sur montreuil.fr
Lire aussi : Quand les mairies du Grand Paris instaurent le congé menstruel
Lire aussi : Embarquez pour un mois de festival « Pop Meufs » au Pavillon des canaux
Lire aussi : Sept Grand-Parisiennes que vous allez avoir envie de rencontrer
Lire aussi : Des Foune Curry aux Vulves assassines, les groupes féminins qui font pogoter le Grand Paris
19 mars 2025 - Montreuil