Pour qui aime l'architecture, Pantin n'est pas dénuée d'intérêt. L'un de ses habitants, le designer et illustrateur Thibaut Guittet, en a tiré une série de crobards. En voici une sélection réalisée avec les tout nouveaux Pantinois de chez BETC, la fameuse agence de pub qui a pris ses quartiers sur les bords du canal.
Construit à la fin du 19ème siècle, l’hôtel de ville de Pantin est l’incarnation des mairies triomphantes qui ont poussé sous la IIIe République. Depuis janvier dernier, il est classé Monument historique. Une rénvovation des façades et des toitures devrait débuter prochainement.
Hôtel de ville de Pantin, 45 avenue du Général Leclerc, Pantin
Chef d’œuvre architectural d’inspiration alsacienne, les Grands Moulins se dressent depuis 1923 sur les bords du canal de l’Ourcq. Au plus fort de leur activité, ils produisent jusqu’à 190.000 tonnes de farine chaque année, faisant du site l’une des premières minoteries de France. Ils ferment finalement leurs portes en 2001 et sont rachetés par le groupe BNP. Un important chantier de réhabilitation est alors confié aux architectes Bernard Reichen et Philippe Robert, qui subliment le bâtiment tout en le modernisant pour le transformer en immeuble de bureaux. Aujourd’hui, les Grands Moulins constituent l’un des symboles architecturaux du Nord de Paris.
Les Grands Moulins, rue du Débarcadère, Pantin
C’est un peu la sœur jumelle de la piscine Molitor à Paris (16e). Comme elle, la piscine Leclerc est construite dans l’entre-deux-guerres, à une période où les loisirs nautiques prennent de l’ampleur mais où la France manque cruellement de bassins, contrairement à l’Allemagne et à l’Angleterre. Son charme vintage avec ses fenêtres en forme de hublots, ses cabines individuelles sur deux étages et ses briques rouges, lui valent d’être classée monument historique depuis 1997.
Piscine Leclerc, 49 avenue du Général Leclerc, 93500 Pantin
Le Ciné 104 est un cinéma de quartier comme on aime en trouver à côté de chez soi. D’ailleurs, on s’y sent chez soi. Il est installé dans une ancienne salle des fêtes du XIXe siècle, ce qui confère à l’endroit un certain charme. Tout au long de l’année, il affiche une programmation variée entre projections, séances Cinés philo, soirées débats… Il accueille aussi le festival de courts métrages Côté court et de nombreux autres événements (ciné-philo, ciné-concert, ciné-goûter, etc.). Depuis 2016, il s’est doté d’un café-restaurant à la décoration soignée, Le Vertigo, qui prend place sous la verrière et déploie une grande terrasse extérieure aux beaux jours.
Ciné 104, 104, avenue Jean-Lolive, Pantin. Plus d’infos sur www.cine104.com
Surtout ne pas se fier pas aux apparences. Avec sa façade de cubes de béton, témoignage de l’architecture brutaliste, le Centre national de la danse n’a pas la grâce de la Philharmonie voisine. Conçu initialement pour abriter la cité administrative de Pantin, le bâtiment dessiné par l’architecte Jacques Kalisz voit pourtant défiler depuis 2004 la fine fleur de la danse contemporaine, du génial concepteur de ballets Angelin Preljocaj au virtuose du hip-hop Kader Attou. En dehors des spectacles, les férus de danse peuvent accéder à la médiathèque et consulter gratuitement 30.000 ouvrages ainsi que 5.000 vidéos.
Le Centre national de la danse, 1, rue Victor Hugo, Pantin. Plus d’infos sur www.cnd.fr
A l’étroit dans ses locaux historiques de la rue du Faubourg-Saint-Honoré à Paris, c’est en 1992 qu’Hermès déménage ses ateliers de maroquinerie à Pantin. Au fil des ans, l’entreprise fleuron du luxe à la française étend son territoire d’origine en investissant des bâtiments industriels désaffectés et des entrepôts. Une « école du cuir » est ouverte de même qu’un showroom, baptisé le Podium Hermès. Autre pièce maîtresse de l’empire Hermès à Pantin, le petit h voit le jour en 2010. Cet atelier, qui regroupe designers, menuisiers, couturiers, orfèvres, maroquiniers ou encore artistes, a pour vocation de recycler les matières premières (soie, cuir, porcelaine, cristal, etc.) inutilisées et promises au rebut pour les métamorphoser en accessoires de toutes sortes. Ces différentes entités mises bout à bout forment la « cité des métiers », récompensée en 2014 par le prix de l’Équerre d’argent d’architecture.
Hermès, 8 rue Florian, Pantin. Plus d’infos sur www.tourisme93.com
Faire du neuf avec du vieux. Depuis 2009, les rives du canal de l’Ourcq à Pantin se prêtent avec succès à l’exercice. Tout a commencé avec les Grands Moulins (voir ci-dessus), ancienne minoterie à l’architecture monumentale transformée en 2009 en bureaux pour BNP Paribas. Autre icône du patrimoine industriel de la ville, les Magasins généraux ont achevé leur mue en 2016 pour devenir le navire amiral de l’agence de publicité BETC. Ce gigantesque bâtiment en béton fut inauguré en 1931, à une époque où le canal servait principalement d’artère pour alimenter Paris en nourriture et en charbon. Son rôle est alors de stocker les marchandises des bateaux trop gros pour atteindre la capitale. Une activité qui décline au fil des décennies en même temps que celle du canal, lourdement impactée par le déménagement des Halles à Rungis en 1969.
En 2004, la Chambre de commerce et d’Industrie de Paris, propriétaire des murs, décide finalement la fermeture des lieux. Si leur destruction est envisagée, l’intervention d’amoureux de l’architecture industrielle permet de sauver le bâtiment qui finit par recevoir le label « Patrimoine du XXe siècle ». Abandonné, il devient le terrain de jeu des graffeurs de toute la région, gagnant ainsi le surnom de « Cathédrale du tag ». A tel point que lorsque BETC décide d’y installer son siège, l’agence commence par inventorier les œuvres, choisissant d’en préserver une quarantaine. Construits sur six niveaux communiquant entre eux par des passerelles métalliques, les anciens entrepôts se distinguent également par leurs grandes verrières. Une coursive extérieure courant sur plus d’1,4 kilomètre donne à l’édifice la silhouette d’un paquebot.
La nouveauté, c’est que tout le monde peut désormais monter à bord. Le rez-de-chaussée abrite pour ce faire des espaces ouverts au public. L’un, Dock B, ouvrira au printemps et s’apparentera à une auberge espagnole avec une cantine équipée de grandes tables, un restaurant bistronomique ainsi qu’un coffee shop, le tout agrémenté d’une programmation artistique et musicale.
L’ensemble prend place au cœur d’une vaste opération d’aménagement de l’ancienne ZAC portuaire de Pantin qui vise à faire naître à l’horizon 2020 un nouveau quartier sur plus de 6 hectares, avec même un port de plaisance.
Les magasins généraux, 1 rue de l’ancien canal, Pantin
Bonus tracks comestibles
À première vue, le P’tit Classé ne paye pas de mine. La façade est d’une sobriété extrême tandis que l’intérieur, une petite salle d’une quinzaine de tables, joue sur les tons blanc et foncé. Seule singularité apparente, l’imposant zinc noir, digne d’un bar de quartier qui serait passé entre les mains d’un styliste. Cette excentricité en cache d’autres, à commencer par le parcours de celui qui se trouve derrière le comptoir, Stéphane Roux. Ex-spécialiste de la finance, il a réalisé son rêve de gosse en ouvrant son restaurant en 2013, anobli depuis par le Gault et Millau. Avec son chef, il propose une carte faisant la part belle aux produits frais, de saison et dans la mesure du possible, locaux. Là encore, l’originalité ne saute pas aux yeux et pourtant. Au milieu des classiques très bien réalisés comme les œufs cocotte pleurotes et roquefort ou l’escalope de veau, purée et sauce foie gras, se glissent des plats inventifs comme ces quenelles de betteraves, croustillant de poireaux ou ces linguine aux crevettes, brocolis, pois gourmands, pesto et piment d’Espelette qui séduisent le palais dès la première bouchée. Et qui donnent envie de revenir pour être surpris à nouveau. D’ailleurs, il est fortement recommandé de réserver, de même qu’il est conseillé de se pencher sur la carte des vins, sélectionnée avec soin auprès de petits producteurs.
Le P’tit Classé, 6, rue Victor-Hugo, Pantin. Menu 16,50 € (midi), à la carte 35 €. www.restaurant-le-ptit-classe-pantin.fr. Tél. : 01 57 14 38 74. Fermé le dimanche. Plus d’infos sur www.restaurant-le-ptit-classe-pantin.fr
Implanté aux Quatre-Chemins, en plein Pantin métissé, Pas si loin est une sorte d’OCNI, un objet convivial non identifié. Dans un quartier où les cafés sont habituellement fréquentés par les hommes, cet espace ouvert par des femmes entend favoriser les liens entre les habitants. A la fois café culturel et restaurant, c’est un lieu taillé pour les rencontres et l’échange. Sa décoration épurée – des murs blancs ornés de quelques tableaux, un comptoir minuscule – tranche avec le mobilier dépareillé, fait de canapés confortables et de tables de toutes les tailles. Du côté de la carte, les prix pratiqués laissent sans voix, mais pas sans appétit. Le menu est à 10 euros et comprend un plat, un dessert et un café ou un thé. Ce qui donne par exemple lieu jaune – carottes au jus d’orange et tarte feuilletée aux pommes et crème d’amande. Le café, lui, n’excède pas 1 euro. Quant à la convivialité, elle est offerte de bon cœur.
Pas si loin, 1 rue Berthier, Pantin. Ouvert tous les jours. Tél. : 09 53 20 37 63
Les dessins de Thibaut Guittet sont à retrouver sur thibautguittet.tumblr.com et sur Twitter.
27 février 2017 - Pantin