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On est allés voir « Urgence climatique » en famille, la nouvelle expo de la Cité des sciences

Parmi toutes les curiosités de la Cité des sciences et de l'industrie figure Solar Impulse, qui trône dans le hall et qui fut le premier avion capable de voler, de jour comme de nuit, sans aucun carburant / © Cité des sciences et de l'industrie
Premier avion capable de voler de jour comme de nuit sans carburant, Solar Impulse trône dans la Cité des sciences et de l’industrie qui a inauguré récemment l’exposition permanente « Urgence climatique » / © Cité des sciences et de l’industrie

Inaugurée le 16 mai dernier, « Urgence climatique » est la nouvelle exposition permanente de la Cité des sciences à Paris que la journaliste d'Enlarge your Paris a choisi d'aller voir en famille pour faire le point et, comme le dit l'écrivain Georges Bernanos, espérer faire l'avenir plutôt que de le subir.

Le panneau à l’entrée d’ « Urgence Climatique », la nouvelle exposition permanente de la Cité des sciences et de l’industrie à Paris (19e), annonce la couleur : « Les activités humaines génèrent du CO2 et une concentration importante de CO2 provoque un dérèglement climatique à l’échelle de la planète. Ce n’est pas une opinion, il y a un consensus scientifique sur la question ». Les climatosceptiques sont donc priés d’aller voir ailleurs.

Une fois le cadre posé, on pénètre dans une scénographie toute de bois conçue et qui se veut « exemplaire », selon les mots de sa conceptrice. « Ouais, enfin y a quand même des écrans », souligne l’ado, qui est entré en phase de contestation +++. Certes, il en demeure quelques-uns, mais il est visible que leur usage a été limité et que tous les matériaux utilisés pour concevoir l’exposition prévue pour durer une décennie seront ensuite réutilisables. Son bilan carbone a même été établi : 330 tonnes de CO2. « Si on avait utilisé des matériaux classiques comme l’acier ou l’aluminium, le bilan aurait été 40 ou 50 fois plus élevé… », explique Adrien Stalter, l’un des commissaires de l’exposition. Une exposition dont le paléoclimatologue Jean Jouzel a assuré le commissariat scientifique et dans laquelle on déambule librement, sans parcours imposé entre les trois espaces : « Décarbonons », « Anticipons » et « Agissons ».

On décide de commencer par un état des lieux en testant, sur un ordinateur, notre rapport au futur. Après avoir répondu à trente questions, j’apprends que je me range dans la catégorie des « moyennement optimistes / très actifs ». Mon conjoint, lui, est « neutre avec une tendance active ». Quant à notre progéniture… « Neutre avec une tendance pessimiste passif ». On ne sera pas venus pour rien, il y a visiblement un peu de boulot. Une autre borne nous permet d’avouer le bilan carbone familial. Là, on s’étrangle un peu : 11,7 tonnes de CO2 par an ! La moyenne en France est de 9,3… Pourtant, on n’a pas de voiture et on prend l’avion au maximum une fois par an ! Oui, nous apprend l’ordi, mais, question consommation d’énergie, on n’est pas au top (coucou la passoire thermique qui nous sert d’immeuble…) et il faudrait qu’on revoie notre consommation de viande à la baisse.

« Franchement, j’aurai pas d’enfants si c’est pour leur faire vivre un enfer… »

Le moral un peu dans les chaussettes, on enquille avec la projection immersive Data du Futur qui présente l’avenir de la planète selon des projections mathématiques en fonction des différents scénarios envisagés par le GIEC. On apprend ainsi que, en 2100, si on parvient à diminuer les émissions de CO2, la température du globe montera de 1,7 °C ; si on les contrôle, la hausse sera de 2,7 °C. En revanche, si les émissions augmentent, il faudra compter avec 4,7 °C supplémentaires. « On va avoir chaud les potos », souligne pragmatiquement notre ado. À la fin de la présentation, il a d’ailleurs une déclaration à nous faire : « Franchement, j’aurai pas d’enfants si c’est pour leur faire vivre un enfer… » Nos cœurs de parents se serrent de tristesse et aussi, il faut bien l’admettre, de culpabilité. Pour info : 75 % des 16-25 ans se déclarent éco-anxieux. La présentation se clôt par une citation de Georges Bernanos : « On ne subit pas l’avenir, on le fait ».

Raison de plus pour bifurquer vers la partie « Agissons » de l’expo pour y faire le plein d’espoir. Car c’est toute l’idée de l’exposition : mettre le public face aux faits mais lui montrer les possibilités d’action qui existent. Comme le souligne Jean Jouzel, il s’agit d’ « interpeller le visiteur et l’inciter à prendre part au projet global de transition écologique afin d’espérer un avenir désirable ». L’ado bloque devant un petit film d’animation sur le rôle de l’État face au changement climatique. « La révolution environnementale ne se fera pas sans justice sociale, explique-t-on en commentaire. Changeons le système, pas le climat ! » Ce petit film redonne le peps en montrant notamment comment l’action citoyenne peut peser face aux États ; et montre l’importance de lier mouvements collectifs et gestes individuels. Nous marquons d’ailleurs l’arrêt aux questions liées à l’alimentation (l’un de nos talons d’Achille). Une installation permet de mesurer l’impact en CO2 d’un kilo d’aliments. C’est sans appel : un kilo de bœuf, c’est 27,84 kg de CO2. Le kilo de lentilles, lui, ne représente que 0,9 kg de CO2. Il est temps de ressortir nos livres de cuisine végétarienne de la bibliothèque…

Un point de vue micro comme macro

On navigue ensuite entre les différents scénarios imaginés par l’Agence de la transition écologique pour aboutir à la neutralité carbone en 2050. « Pari réparateur » – avec des data centers 15 fois plus énergivores qu’en 2020, omniprésence de l’IA et culture intensive – tout comme « Technologies vertes », qui prône la mise en concurrence des territoires et le « consumérisme vert » me laissent songeuse… « Génération frugale » – qui mise sur la sobriété, le low tech, la gouvernance locale – ou « Coopérations territoriales » – avec économie du partage et fiscalité environnementale – me tentent bien davantage.

Regardant le sujet d’un point de vue micro comme macro, « Urgence climatique » a le mérite de poser le problème mais aussi de laisser au visiteur la possibilité d’imaginer des possibles. Et lui permet de s’envisager, non pas comme le jouet d’une fatalité contre laquelle il ne peut rien, mais plutôt comme l’acteur d’une révolution qui, si chacun s’y attelle, peut se révéler enthousiasmante.

Infos pratiques : exposition permanente « Urgence climatique » à la Cité des sciences et de l’industrie, 30, avenue Corentin-Cariou, Paris (19e). Fermé le lundi. Tarifs : 13 € (plein tarif), de 3,50 à 10 € (tarifs réduit), gratuit pour les moins de deux ans. Accès : métro Porte de la Villette (ligne 7) / tramway T3b Porte de la Villette. Plus d’infos sur cite-sciences.fr

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