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La Sauge, l’association passeuse d’agriculture dans le 93

La Prairie du canal à Bobigny / © La Prairie du canal
La Prairie du canal à Bobigny / © La Prairie du canal

En 1950, les deux tiers de la Seine-Saint-Denis étaient des terres agricoles. Pour réconcilier le département avec son histoire et sensibiliser les habitants à l'agriculture durable, l'association la Sauge investit les friches pour en faire des lieux de production agricole et d'apprentissage.

Ce reportage a été réalisé par Enlarge your Paris et publié dans la revue en ligne Arpenter dont le 1er numéro est sorti en septembre sous la houlette d’In Seine-Saint-Denis

Sur la RN3, au niveau de Bobigny (Seine-Saint-Denis), les automobilistes filent sans se rendre compte qu’à quelques mètres d’eux se joue une petite révolution. L’objectif : « Que tout le monde puisse jardiner deux heures par semaine ! », résume Swen Déral, cofondateur de la Sauge (Société d’agriculture urbaine généreuse et engagée). Là, entre la nationale et le canal de l’Ourcq, s’est installée la ferme urbaine de la Prairie du Canal sur ce qui était autrefois l’usine MBK.

Le jeudi, les bénévoles peuvent y prêter main forte aux salariés de l’association. La démarche n’a rien de gadget. « Nos fermes sont accessibles au grand public pour favoriser une démarche d’engagement », explique Swen Déral. A Bobigny, la Prairie du canal est une invitation à s’imprégner en douceur de la question de la transition écologique. Les ateliers permettent ensuite de pousser plus loin la découverte. Puis la location de parcelle pour, dans certains cas, envisager une réorientation professionnelle dans le secteur agricole. L’idée n’a rien de saugrenu. « Il ne faut pas  oublier que, dans 10 ans, 50% des agriculteurs actuels seront en retraite, rappelle Swen Déral. Et qu’une partie de la relève se trouve en ville. »

Sensibiliser à l’alimentation durable

Mais comment faire éclore des vocations d’agriculteurs dans un département pas franchement réputé pour son potentiel agricole ? « La problématique de l’alimentation durable passe par l’éducation et l’accès à la terre », analyse le cofondateur de la Sauge. A Aubervilliers, une autre ferme urbaine gérée par la Sauge, Terre-Terre, propose comme à Bobigny des jeudis bénévoles mais de louer des parcelles à 2 € par mois. « Mais ça ne nous intéresse pas de juste donner un bout de terrain. Ce que nous voulons, c’est vraiment accompagner les gens. » Dans le futur parc intercommunal du Glacis, à Saint-Denis, l’association aura la charge de 6500 m2 avec Engrainage. « On sera comme les gardiens du parc », s’enthousiasme Swen Déral. L’un des objectifs sera de fournir des paniers de légumes. 

Pour l’heure, retour à La Prairie du Canal où tout a démarré il y a cinq ans. En cette journée ensoleillée, Julie et Samira s’activent. Les deux jeunes femmes repiquent des plantes pour les mettre dans le système d’hydroponie de la ferme. « Je suis citadine et je n’ai jamais eu l’occasion de jardiner, explique Samira originaire de Pavillons-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Venir ici, c’est l’occasion d’apprendre. » Julie venue en voisine de Pantin abonde : « Je suis ingénieure travaux. Alors oui, je suis sur le terrain, mais je ne mets pas la main à la pâte. Et c’est bien de pouvoir accomplir des tâches agricoles sans avoir à aller au fin fond du 77 ! »

« Il faut savoir passer de la tête à la main »

Mélina aussi vient de Pantin. Et ressentait également ce besoin de « mettre les mains dans la terre ». Pour elle, offrir quelques heures de son temps à la Prairie du canal est aussi éminemment politique : « Je suis très intéressée par l’autosuffisance. La sécurité alimentaire est un sujet qui me passionne. A mes yeux, cela passe par le fait que chacun ait un petit lopin de terre. Alors lire des livres sur le sujet, c’est bien, mais à un moment, il faut y aller ! ». Aussi, ce matin-là, elle repique du basilic. « Il faut savoir passer de la tête à la main », sourit-elle. L’agriculture est définitivement l’affaire de tous.

Infos pratiques : La Prairie du canal, 55 rue de Paris, Bobigny (93). Accès : Métro Bobigny – Pantin – Raymond Queneau Ligne 5. Plus d’infos sur canalprairie.fr

Ce reportage a été réalisé par Enlarge your Paris et publié dans la revue en ligne Arpenter dont le 1er numéro est sorti en septembre sous la houlette d’In Seine-Saint-Denis

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