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« Why Versailles ? », le docu qui retrace les origines de la French touch

La première édition de Versailles électro en 2019 / © Anthony Ghnassia
La première édition de « Versailles électro » en 2019 / © Anthony Ghnassia – Versailles électro

Air, Phoenix, Étienne de Crécy, Alex Gopher… Autant de Versaillais qui ont marqué la scène électro internationale et dont le producteur et musicien Marc Collin, Versaillais lui aussi, retrace l'histoire à travers le documentaire « Why Versailles ? » qui sera présenté en février 2022. Enlarge your Paris s'est entretenu avec lui.

Comment expliquer que Versailles ait vu naître autant de groupes de musique électro ?

Marc Collin : L’histoire commence avec les frères Gondry, qui ont monté des groupes de musique à Versailles avant de faire des films dans les années 1980. Ils ont influencé la génération suivante de jeunes, que j’appelle la génération Jules Ferry, du nom du lycée où ils étaient scolarisés à Versailles. C’est là que les membres du groupe Air, Étienne de Crécy, Arnaud Rebotini, Alex Gopher, moi et d’autres nous sommes rencontrés. Nous avons commencé à faire de la musique chez nous, dans des caves, plutôt orientée rock. À la fin des années 1980, une vraie révolution s’est produite avec l’arrivée des nouvelles technologies. Venant de milieux plutôt aisés, nous avons pu nous acheter des ordinateurs et nous nous sommes tournés vers la musique techno et électronique. Il y avait une vraie émulation. Chacun s’est mis à produire son propre son mais nous nous sommes tous influencés les uns les autres.

Ce courant prend le contrepied de l’image que l’on peut avoir traditionnellement de Versailles…

Effectivement, sur le papier, ce n’est pas une ville qui se destinait à la musique électro. On associait plutôt Versailles à Molière, au château, à la musique classique, à une ville bourgeoise tournée vers son patrimoine historique. Je pense que la ville est aujourd’hui beaucoup moins conservatrice qu’elle n’a pu l’être et qu’elle s’est davantage ouverte aux jeunes. Mais, à notre époque, il n’y avait pas grand-chose à faire en sortant de l’école et le soir. Ce n’était pas comme à Paris. Pour casser l’ennui, nous devions nous montrer créatifs.

Comment étiez-vous perçus à l’époque ?

Quand on a commencé, on était vraiment des outsiders. On était considérés comme des rebelles, des bad boys. Le lycée Jules-Ferry était le lycée des filières techniques et on ne peut pas dire que ces filières étaient très valorisées à Versailles. Personne n’aurait misé un centime sur nous. La prise de conscience qu’un courant musical était en train de naître est arrivée plus tard, au début des années 2000. Personnellement, c’est lorsque je suis parti jouer avec mon groupe Nouvelle Vague en Australie et que j’ai vu qu’Air et Phoenix étaient aussi là-bas que je me suis dit qu’il se passait vraiment quelque chose, que tous ces groupes nés à Versailles commençaient à avoir une sacrée notoriété, même à l’étranger.

Comment la ville de Versailles s’est-elle emparée de ce mouvement ?

La mairie de Versailles a commencé à s’intéresser à ce mouvement quand des journalistes anglais se sont mis à évoquer l’existence d’une French touch versaillaise. Il y a ensuite eu quelques colloques, des livres qui sont sortis sur le sujet, puis une soirée au château de Versailles. Aujourd’hui, les élus en sont très fiers et essayent de mettre cette scène en avant, notamment en organisant chaque année le festival Électrochic.

Comment avez-vous construit votre docu-fiction Why Versailles ? ?

Je suis parti d’une histoire vraie, celle de Franck Mossenta qui était un musicien que j’ai rencontré au lycée. En 1995, il a tout laissé tomber. Il est parti s’installer à Seattle et nous n’avons plus entendu parler de lui. On l’a revu une dizaine d’années plus tard lorsque l’on est venus jouer aux États-Unis avec nos groupes respectifs. Il m’a raconté une anecdote géniale qui m’a donné envie de faire ce film. Un jour, il est allé chez son disquaire qui avait mis en place une opération spéciale French touch. Sur les pochettes de disques, il a reconnu tous ses copains d’enfance. Il s’est demandé ce qu’il s’était passé, ce qu’il avait raté, comment en si peu de temps après son départ tout avait explosé. Il est le fil rouge de mon documentaire-fiction. Il fouille dans sa mémoire et raconte la naissance de ce courant musical à Versailles que je mets en images avec des documents d’archives grâce à un partenariat avec l’INA et avec des photos et des vidéos qu’ont retrouvées la trentaine d’artistes que je fais intervenir.

Les habitants de Versailles ont-ils connaissance de cette histoire ?

Il y a une quinzaine d’années, on a assisté à un engouement des médias pour certains noms de la French touch versaillaise. Encore aujourd’hui, il y a à Versailles des artistes qui suivent notre route. Mais je ne suis pas certain que les habitants aient vraiment connaissance de cette scène locale. Avec mon film, j’essaie d’inscrire l’histoire de ce courant musical dans une histoire plus globale. Je raconte les années 1980 pour comprendre comment la ville est devenue un berceau de la musique électro française. L’avant-première de Why Versailles ?, qui aura lieu en février dans le cadre du festival Fame à la Gaîté Lyrique à Paris (3e), sera l’occasion de découvrir cette improbable aventure.

Infos pratiques : la prochaine édition de « Versailles électro » face au château de Versailles aura lieu le 28 mai 2022 avec à l’affiche entre autres Justice et L’Impératrice. Plus d’infos sur Facebook

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