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Le Sample, la nouvelle friche « middleground » de Bagnolet

Le Sample à Bagnolet / © Arnaud Idelon
Le Sample à Bagnolet / © Arnaud Idelon

Située à deux pas du périphérique, le Sample, nouvelle friche grand-parisienne installée dans un ancien atelier de Bagnolet, ouvre ce 19 juin au public et ce pour au moins 18 mois. Enlarge your Paris a rencontré deux de ses instigateurs, Aude Masboungi, de l'agence la Belle Friche, et Arnaud Idelon, de la coopérative Ancoats.

Vous ouvrez ce samedi 19 juin le Sample à Bagnolet. Présentez-nous cette nouvelle friche ?

Aude Masboungi : Initialement, le sample est un enregistrement sorti de son contexte et qui, intégré à un autre morceau, va donner lieu à un nouvel ensemble. C’est un peu l’idée de cet endroit. Il s’agit des anciens ateliers Publison. L’entreprise a déménagé en octobre et le site a été racheté par Sopic qui nous a ensuite contacté la Belle Friche. Le promoteur n’a pas de projet sur le devenir du lieu. Nous allons donc y travailler avec lui. Nous sommes là pour au moins dix-huit mois voire plus. Nous avons à notre disposition 3000 m2 d’espaces intérieurs et 1500m2 de jardin. 

Arnaud Idelon : Chez Ancoats, nous avions envie de monter un lieu, nous qui, la plupart du temps, accompagnons leur création. Avec le Sample, nous serons sur un lieu « middleground » : pas underground mais pas mainstream non plus.

Sur quoi va reposer la programmation du Sample ?

Arnaud Idelon : Le Sample sera un lieu de travail avec une trentaine de bureaux qui accueilleront une soixantaine de résidents. Il servira aussi d’espace pour la vie associative bagnoletaise avec des salles polyvalentes mises à disposition. Il sera bien sûr un lieu d’accueil du public avec une programmation concoctée par la Belle Friche et Ancoats et une autre ouverte aux propositions des gens. Il y aura des open mics, des concerts. Ce qu’on veut, c’est de la surprise. Et pour garder une trace de cette nouvelle friche en train de se faire, une chercheuse viendra un jour par mois documenter ce qui s’y passe tandis que des étudiants lui consacreront un mémoire.

Comment décide-t-on du lieu dans lequel on installe une friche ?

Arnaud Idelon : Il existe plusieurs typologies. Au Wonder à Clichy (Hauts-de-Seine) ou au 6b à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), ce sont des communautés qui avaient besoin d’espaces de travail qui ont commencé par repérer un lieu avant de le squatter et de prendre contact avec le propriétaire. Au 59 Rivoli à Paris, on est sur un squat qui a fini par être « légalisé ». On a aussi le modèle des appels à projets et les situations de gré à gré comme au Sample où Saupic s’est tourné vers nous.

Aude Masboungi : Il y a également la question du modèle économique. Chez La Belle Friche, nous affichons clairement aux propriétaires des lieux qu’une opération d’urbanisme transitoire est rarement rémunératrice. Mieux, nous leur disons qu’il faut qu’ils participent à l’économie de l’endroit pour que les coûts ne se répercutent pas sur les utilisateurs du site, qu’il s’agisse des personnes en résidence ou du public. Si leurs intérêts ne se mesurent pas directement économiquement, ils se traduisent en termes de communication et en termes de valorisation qualitative du projet.

Justement, il y a aussi le « casting » des résidents qui contribue à l’alchimie du lieu. Pour le Sample, comment avez-vous procédé ?

Arnaud Idelon : Nous avions pour critères le besoin d’espaces bon marché, le rayonnement sur le territoire et la mixité des pratiques pour qu’il y ait une variété d’activités. Mon rêve, ce serait par exemple qu’un architecte qui travaillera au Sample s’associe à un designer qui est aussi sur place et qu’ils répondent ensemble à un appel d’offre.

Aude Masboungi : Ce qui est frappant à chaque fois, c’est de voir l’afflux de demandes. On voit bien le problème qui se pose aux jeunes artistes et aux entrepreneurs qui veulent se lancer et qui sont à la recherche d’espaces de travail. Pour annoncer l’ouverture de nouveaux lieux, les réseaux sociaux sont très utiles. Mais nous souhaitions aussi sortir de notre réseau. C’est pourquoi nous avons travaillé avec la mairie et les acteurs locaux pour toucher au-delà de notre cercle. 

Comment fait-on pour assurer la mixité sociale dans les friches ?

Aude Masboungi : Cela passe par un travail avec les acteurs locaux pour, en plus du public grand-parisien, avoir un ancrage très fort sur la ville. D’où notamment l’appel à la programmation ouverte.

Arnaud Idelon : Un très grand espace est aussi dévolu aux associations, pour des cours du soir, des répétitions. 

Quels sont les écueils à éviter ?

Arnaud Idelon : Vouloir en faire un lieu générique. Avec un petit bout d’agriculture urbaine, un petit bout de culture… Ça donne une sorte de sandwich horrible ! Or il faut regarder le contexte, ne pas arriver comme si on était des parachutés. Il faut partir du tissu associatif, du désir et des manques. C’est la démarche que nous avons eu au Sample car la Belle Friche était déjà allée voir les acteurs associatifs bagnoletais. 

Aude Masboungi : Nous connaissions les enjeux liés à la commune. Il y a par exemple une disparité entre le taux d’emploi et les entreprises locales où ne travaillent que 10% des Bagnoletais. On voudrait donc que le Sample soit aussi un lieu de formation pour favoriser l’emploi. Bagnolet est par ailleurs une ville avec peu de lieux culturels. Nous pourrions apporter notre pierre…

On parle ici du fond. Et dans la forme, quelles erreurs seraient à éviter ? 

Aude Masboungi : Je crois qu’il faut vraiment bien chiffrer les travaux. Se garder le luxe de choisir de faire du social et du solidaire. Parce que si on n’a plus de marge de manœuvre financière, soit on arrête, soit on doit faire des concessions : s’associer à des marques, proposer des événements mainstream ou avoir un bar qui marche…

Arnaud Idelon : Le danger peut être également de suréquiper un lieu, mais de ne pas penser aux équipes pour le faire tourner. Il faut aussi laisser la place à la réciprocité, au don/contre-don. Parce que c’est aussi ce qui fait la grosse valeur de nos lieux. 

Faut-il tout définir à l’avance ? 

Aude Masboungi : Non, parce que le lieu va se définir aussi par les gens qui vont l’habiter. Donc on se laisse cette marge de liberté, d’incertitude. Ce n’est que dans deux ans qu’on pourra dire : « En fait, le Sample, c’était ça… »

Infos pratiques : Le Sample, 18 avenue de la République, Bagnolet (93). Ouverture à partir du 19 juin. Accès : Métro Gallieni Ligne 3. Plus d’infos sur Facebook

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