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Comment donner le goût de lire aux enfants et aux ados ?

Salon du livre et de la presse jeunesse à Montreuil @Eric Garault
Le Salon du livre et de la presse jeunesse se tient à Montreuil du 29 novembre au 4 décembre / © Éric Garault

Comment transmettre le plaisir des livres aux enfants sans les brusquer ni les dégoûter ? Sylvie Vassallo, directrice du Salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil qui débute ce 29 novembre, nous éclaire sur cette épineuse question.

Comment le Salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil encourage-t-il à la lecture ?

Sylvie Vassallo : Notre préoccupation est de permettre à tous les enfants d’accéder à la lecture. Lire n’est pas seulement une activité cérébrale, cela engage aussi le corps, il suffit de voir le nombre de positions que l’on prend pour lire. Par ailleurs, la littérature parle beaucoup de corps. À travers ce thème, « La tectonique des corps », cette 39e édition pose donc la double question de l’implication du corps dans l’activité de lecture et de la représentation de nos corps dans la littérature. C’est un sujet qui passionne les enfants : en seulement 20 ans, n’oublions pas que l’enfant subit une multitude de changements corporels. Par ailleurs, nous avons voulu nous intéresser aux manières dont la littérature peut aborder des thèmes d’actualité comme les violences faites aux enfants et le harcèlement. Près de 300 créateurs viennent au salon pour rencontrer les publics. On sait aussi à quel point la lecture est favorisée par les rencontres. C’est une continuité du projet « Des livres à soi » que l’on mène toute l’année, soutenu par le ministère de la Culture, pour former parents et professionnels de l’enfance à favoriser l’accès à la lecture des plus jeunes.

Est-ce un cliché de dire qu’il est difficile de faire lire les enfants, et surtout les adolescents ?

Oui et non. Dans de récentes études sur la lecture, les enfants déclarent aimer lire dans des proportions assez importantes, bien que ce ne soit pas forcément leur loisir préféré. À partir du collège, ça se corse, particulièrement pour les garçons. Cette rupture peut être définitive comme transitoire. Il n’y a pas de règle.

Comment donner envie de lire à son enfant ?

Bien que ce soit une question essentielle, il faut d’abord veiller à ne pas en faire un impératif. Ensuite, il est important d’entrer en contact avec les livres le plus tôt possible. Cela passe d’abord par le fait d’en lire soi-même devant ses enfants, et de les laisser traîner dans le logement, même quand l’enfant ne sait pas encore tourner les pages. L’entrée en lecture sera plus facile pour eux si le livre est un objet du quotidien. Car la lecture se transmet beaucoup par mimétisme. Il faut aussi montrer qu’il y a différentes manières de lire, ensemble ou seul, longtemps ou quelques minutes, et qu’on peut en discuter, ou pas. Une fois l’apprentissage de la lecture acquis, il faut essayer de rendre les enfants prescripteurs. On peut aussi continuer à leur lire des livres à haute voix. Transmettre son émotion est fondamental.

L’idée que les albums ou les bandes dessinées ne sont pas vraiment des livres est encore tenace…

Il faut savoir reconnaître la lecture dans toutes ses dimensions, y compris sur portable. Si un enfant lit de la BD ou des mangas, il faut déjà reconnaître sa capacité à les lire. Ce n’est pas évident pour tout le monde ! La BD développe une autre forme de rapport entre le texte et l’image, et permet de s’ouvrir à d’autres espaces imaginaires. En réalité, c’est un faux débat. Peu importe le support, seule compte la qualité des histoires.

Justement, comment réagir quand un jeune se tourne vers des lectures peu à notre goût ?

On a tous ressenti des divergences avec nos parents, il me semble ! Cela fait aussi partie de la construction de chacun. Ce n’est pas parce que la qualité littéraire n’est pas toujours présente qu’il n’est pas agréable de se passionner pour un livre. Si cette lecture permet d’accéder ensuite à d’autres textes plus complexes, tant mieux !

Doit-on pousser les jeunes à lire les classiques ?

Vaste question ! D’un côté, je partage l’idée selon laquelle certaines lectures doivent être abordées à l’école, que la littérature classique nous permet de mieux comprendre notre monde, notre Histoire. D’un autre côté, je comprends que l’on puisse avoir envie de refermer un livre dont la langue utilisée semble inaccessible. Mais cela dépend aussi des livres… Alice au pays des merveilles garde par exemple une certaine modernité, grâce aussi aux récentes traductions, alors que des livres comme 20 000 Lieues sous les mers me paraissent plus difficiles à aborder. C’est pour cela qu’il est important de faciliter l’accès à ces univers en lisant ensemble, en discutant. J’ajoute que le rapport à la lecture est quelque chose d’ô combien personnel. De multiples raisons peuvent pousser à se distancier des livres. Il faut l’accepter car rien n’empêche d’y revenir plus tard.

La lecture, finalement, c’est comme le vélo…

Oui, ça ne s’oublie pas ! Et il est plus facile d’y revenir si on a été en contact très jeune avec les livres et si on a déjà apprécié cette activité. Si ce n’est pas le cas, l’objet peut faire peur. Mais, quand on a le déclic, cela fonctionne toujours ; il n’est jamais trop tard.

Comme le cinéma, le livre est-il aujourd’hui en danger face à la tentation des écrans ?

La concurrence des livres avec les écrans existe, bien entendu, mais la lecture reste une activité intrinsèquement liée à l’école. Le socle scolaire, les associations et les réseaux de lecture publics sont pour l’instant toujours à l’œuvre !

Infos pratiques : Salon du livre et de la presse jeunesse à Paris Montreuil Expo, 128, rue de Paris, Montreuil (93). Du 29 novembre au 4 décembre. Tarifs : gratuit mercredi, jeudi et vendredi, 5 € samedi, dimanche et lundi pour les plus de 18 ans. Accès : métro Robespierre (ligne 9). Infos et réservations sur slpjplus.fr

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