Après la fête KM1 organisée en 2016 à Clamart pour le lancement des travaux du Grand Paris Express, vous organisez KM2 à Cachan le 1er novembre. Que va-t-on célébrer cette fois ?
José-Manuel Gonçalvès. Pour poser la future gare de Cachan, on va glisser sous les rails du RER B une sorte de pont qui fait deux fois le poids de la tour Eiffel. C’est tellement incroyable et spectaculaire qu’on s’est dit qu’il fallait célébrer cette performance technique avec des performances artistiques. Mais aussi en partageant un repas de chantier avec les habitants.
C’est ce que vous appelez « gigot-bitume »…
C’est une tradition des débuts de chantiers. On coule du bitume brûlant sur un gigot avant de le partager sur une grande table commune. Je vous rassure, nous avons fait évoluer la recette. Nous allons profiter de cette fête pour proposer aux habitants une rencontre avec les architectes de la future gare. Ce sera également le jour de l’installation sur le chantier du collectif Yes We Camp, qui s’est notamment fait connaître en participant à l’animation de la friche éphémère des Grands Voisins sur le site de l’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul à Paris (14e). C’est donc à la fois une fête de chantier et une fête de voisins avec les ouvriers, les élus, des artistes et les habitants.
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Avez-vous déjà programmé d’autres fêtes dans les mois qui viennent ?
Ce sont les avancées des chantiers qui nous dictent notre calendrier, ce qui est assez particulier pour une programmation culturelle. En février, nous ferons un gros événement à Champigny (94) à l’occasion de l’installation de notre premier tunnelier, une gigantesque machine à creuser la terre de cent mètres de long et de plus de cinq tonnes. En mai, nous organiserons des fêtes dans six chantiers où vont prendre place, à l’instar de Yes We Camp, d’autres spécialistes des installations éphémères comme les artistes écologiquement engagés de Coal, les architectes du Collectif Parenthèse ou l’association Agrafmobile qui s’intéresse aux arts visuels. L’idée est que chaque équipe apporte sa vision de la ville et de ses usages et la partage avec les habitants. Le chantier est un temps de friche et les friches sont toujours propices aux échanges, aux projections, aux inventions. Notre objectif n’est pas de masquer les désagréments qui découlent des travaux en cours mais d’utiliser ce temps de transition pour provoquer les rencontres.
Le chantier du Grand Paris Express possède un volet artistique. Comment cela se matérialise ?
Vingt-et-un duos d’artistes et d’architectes travaillent ensemble à la création d’œuvres pour les futures gares. Parmi ces artistes, une dizaine jouissent d’une renommée internationale. Les autres sont émergents comme le designer belge Ramy Fischler ou l’Espagnol Pablo Valbuena. En les choisissant, nous parions sur le fait qu’ils vont marquer l’histoire de l’art de notre temps. Au final, notre idée est de constituer, à l’échelle du réseau du métro du Grand Paris Express, un musée avec des techniques et des esthétiques très variées. Aux côtés des plasticiens, on trouvera aussi des œuvres de musiciens, de couturiers ou encore de cuisiniers. Les arts d’aujourd’hui, ce ne sont pas seulement les arts plastiques.
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Pourquoi faire une place à l’art dans un chantier de transport ?
Quand vous allez sur le terrain, là où le métro va arriver d’ici quelques années, les gens ont tout à fait conscience de ce que cela va changer pour eux. J’ai récemment interrogé des habitantes de Clichy-sous-Bois (93) qui m’ont répondu “Vous vous rendez compte de ce que représente pour nous ce métro ? Pour aller travailler, aller à Paris en 15 mn ! On l’attend notre ligne !” Alors, pourquoi ajouter de l’art aux transports ? En allant dans ce que l’on appelait hier la banlieue, et ce qui devient le Grand Paris, on ne doit pas se contenter d’améliorer la rapidité et le confort d’un service. Il faut aussi que ce soit beau, et construire en périphérie avec le même soin qu’à Paris.
Le geste artistique est donc un geste politique…
Absolument. On n’a pas décidé de faire uniquement des trous dans lesquels les gens vont attraper un train. On va modeler des quartiers, créer de l’attractivité, du désir et de la fierté. Et cet enjeu est clair pour tout le monde. Je suis frappé par le volontarisme et l’enthousiasme des grands architectes, des artistes et des élus qui sont impliqués. Nous sommes ensemble au service d’un projet qui nous dépasse. C’est très impressionnant, très émouvant et jubilatoire.
Infos pratiques : « KM2, repas de chantier entre performances techniques et artistiques », mercredi 1er novembre de 16h à 22h à la gare d’Arcueil-Cachan, avenue Carnot, Cachan (94). Entrée libre. Plus d’infos sur Facebook
25 octobre 2017