Dans notre culture, s’exposer au froid est contre-intuitif. On va plutôt chercher à s’en protéger. Quelles ont été vos sources d’inspiration ?
Le Crapaud Sonneur : Même si elles sont avérées scientifiquement, les vertus de l’exposition au froid restent encore très peu connues du grand public. En France, Maurice Daubard, décédé en 2022 à l’âge de 92 ans, a longtemps été le seul à s’en faire le porte-parole. Ce yogi de Moulins-sur-Allier (Allier) est venu au froid pour guérir de la tuberculose alors que le corps médical ne lui accordait quasiment aucune chance de survie. Il a observé que ça lui faisait du bien et, à partir de 1956, il a commencé à s’exposer au froid tous les hivers. Cette méthode lui a permis de vaincre la maladie et il est devenu par la suite un yogi de premier ordre au niveau européen. Il a écrit de nombreux ouvrages sur le sujet et créé l’Institut Maurice-Daubard, qui propose des stages ouverts à tous chaque hiver. Nous avons eu la chance d’effectuer plusieurs stages en montagne avec lui et de l’avoir eu comme enseignant de yoga. Parmi les autres figures incontournables du froid, on trouve également le Néerlandais Wim Hof. Il a débuté en s’immergeant dans les canaux d’Amsterdam pour soigner sa déprime et s’est rendu compte que cela changeait sa perception du monde. Il touche aujourd’hui des milliers de personnes à travers le monde et forme des instructeurs à sa méthode. J’ai aussi (Cyrille) suivi des stages avec Leonardo Pelagotti, l’un de ses instructeurs. Un film retraçant sa vie, The Iceman, va bientôt sortir. Ces personnalités que sont Wim Hof et Maurice Daubard ont permis de vulgariser l’exposition au froid, mais c’est une pratique très ancienne qui existe depuis toujours dans le yoga.
Concrètement, quelles sont les vertus du froid ?
Elles sont tout d’abord physiologiques. C’est la gym de notre système cardiovasculaire. Notre corps est composé de 100 000 km de vaisseaux sanguins. Ce sont les tubes qui transportent le sang dans l’organisme. C’est à nous d’entretenir ce réseau de plomberie que nos vies sédentaires engourdissent. Le froid va mobiliser toutes les capacités adaptatives du corps. Il permet d’activer la microcirculation sanguine, qui favorise le bon fonctionnement de nos organes vitaux, ainsi que la thermorégulation, c’est-à-dire le fait de maintenir le corps à bonne température. La seule manière de devenir moins frileux est de s’exposer volontairement au froid. Ce n’est pas en rajoutant des couches de vêtements supplémentaires. À chaque exposition, notre seuil de tolérance augmente. Le froid est également un moyen de prendre soin de sa peau et de booster ses défenses immunitaires pour éviter de tomber malade. Durant une exposition au froid, notre corps réagit et fabrique des globules blancs. Ces globules blancs sont notre armée intérieure. Enfin, du fait de l’excitation qu’elle provoque, l’exposition au froid entraîne la sécrétion d’hormones comme l’adrénaline, la sérotonine et la dopamine, qui favorisent la joie et la détente. Et tout cela, soulignons-le, gratuitement !
Le froid est donc un remède à portée de tous…
Lorsqu’on se met au froid, on fait vraiment travailler tout son corps. Le corps a besoin de travailler pour être en bonne santé. On le voit, la sédentarité est un problème de santé publique majeur à l’heure actuelle qui a pris de l’ampleur avec la crise du covid. Notre confort moderne nous coupe des capacités de notre corps. Or ce qui n’est pas utile finit invariablement par disparaître. S’exposer au froid est une manière de reprendre le pouvoir sur sa vie ; c’est une médecine accessible à tous.
La difficulté est d’être conscient qu’avec le froid on se fait du bien…
C’est pour ça qu’il est important d’avoir les outils et d’être accompagné. Il faut apprendre à gérer l’inconfort, ce qui constitue une autre vertu du froid, cette fois sur le plan psychologique. Tout est question de posture. L’essentiel est de ne pas subir la situation mais d’accueillir le froid en conscience en plongeant dans son souffle et dans ses sensations. Passé le moment de saisissement, on va sentir que le corps et le système nerveux se régulent. On apprend ainsi à s’adapter à d’autres situations inconfortables suscitées par notre vie personnelle ou professionnelle. Le froid est une façon de s’entraîner à gérer le stress. C’est pour cela qu’il ne faut pas le voir comme un défi mais plutôt comme un apprentissage.
Fuir peut être une manière de se protéger…
Lorsque nous sommes face à un danger ou en situation d’inconfort, c’est notre système nerveux dit sympathique qui s’enclenche. C’est celui qui nous protège depuis la nuit des temps face aux agressions extérieures et qui provoque des attitudes de fuite ou de combat. C’est ce que l’on appelle l’instinct de survie. Mais en parallèle il existe le système nerveux parasympathique qui favorise le calme et la détente en abaissant le rythme cardiaque et en régulant la respiration. Quand on active le parasympathique, on ne réagit pas mais on accueille : on prend du recul et on gère le stress. C’est précisément ce que l’on apprend en s’exposant au froid en conscience et dans le calme.
Justement, que propose le Crapaud Sonneur pour s’initier aux bienfaits du froid ?
Nous avons créé deux formats différents que nous avons appelés « Journée Celsius » et « Week-end Celsius ». « Celsius », parce que nous incluons l’expérience du chaud. Dans les deux formules, nous apportons un contenu théorique pour faire comprendre les vertus du froid et les mécanismes physiologiques en jeu. Passé la théorie, on propose des exercices de yoga pour faire circuler l’énergie dans le corps et des exercices de respiration spécifiques (pranayama), notamment des rétentions d’air, pour détendre le mental et activer le système parasympathique. Après ces étapes de préparation, tout le monde est convaincu, prêt et détendu pour une première immersion qui se fait dans notre piscine ou dans un petit bassin d’eau glacée. C’est un moment d’émotion et de rencontre avec soi. Il y a ensuite la phase du réchauffement, de la détente avec un repas convivial et de l’intégration avec la relaxation. Nous explorons ensuite d’autres formes d’exposition au froid (mais nous ne voulons pas tout dévoiler !) et nous terminons avec un long sauna traditionnel dans la forêt et au bord d’un grand étang naturel. La « Journée Celsius » est un format très condensé. Le « Week-end Celsius » permet d’approfondir la relation au froid mais aussi de consacrer davantage de temps à la relaxation et à la détente. En effet, le repos, la relaxation et les exercices de récupération sont essentiels pour que l’expérience soit positive. N’oublions pas que le but premier est de se faire du bien tout en s’autorisant à explorer son potentiel et ses limites pour mieux se connaître ! Le cadre du week-end y contribue car les stagiaires sont logés au cœur de la nature dans des logements insolites (mais confortables) dans la vallée. Le corps humain est plein de ressources. Tout ce qu’il faut, c’est en avoir conscience et en faire l’expérience dans de bonnes conditions. C’est cela que nous proposons au Crapaud Sonneur, avec les formules Celsius ou avec les semaines de jeûne Buchinger. Le bien-être est accessible à tous, avec des pratiques simples et naturelles. D’ailleurs, le slogan du Crapaud Sonneur, c’est : « En pleine forme, en pleine nature » !
Infos pratiques : Le Crapaud Sonneur, Beaumont-Sardolles (58). Prochains « Week-ends Celsius » : du 31 janvier au 2 février, du 7 au 9 février, du 14 au 16 février. Tarif : à partir de 346 € par personne en loft partagé. Accès : gare de Nevers (2 h en train depuis la gare de Bercy à Paris) puis navette entre Nevers et Beaumont-Sardolles assurée par le Crapaud Sonneur (25 min). Tél. : 06 81 49 14 88. Plus d’infos sur lecrapaudsonneur.com et sur Instagram
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12 décembre 2024 - Beaumont-Sardolles