La privation agit toujours comme un révélateur. Depuis le printemps dernier, l’accès à la nature n’a jamais été autant défendu dans le Grand Paris. Lors du premier confinement, l’association Respire avait déposé devant le Conseil d’Etat un référé-liberté visant à rouvrir les parcs et jardins restés bouclés en Île-de-France jusqu’à fin mai. Cette fois, c’est l’accès aux forêts pour tous, quelque soit son lieu de résidence, qui est réclamé par un collectif emmené par les fondateurs de Chilowé, Ferdinand Martinet et Thibaut Labey, et le photographe Yann Arthus-Bertrand.
Dans une interview à Enlarge your Paris en mai, Philippe Clergeau, professeur en écologie au Muséum national d’Histoire naturelle constatait déjà « ce que le confinement a souligné profondément, c’est une envie de nature qui renvoie à l’intime de nos êtres, à un besoin viscéral. » Analyse partagée par Jean-Noël Consalès, maître de conférences en aménagement du territoire, urbanisme et géographie à l’université d’Aix-Marseille, pour qui « depuis la crise du Covid-19, les espaces naturels sont vus comme un besoin, auparavant sous-jacent mais désormais nettement exprimé. »
Si ce besoin de nature est aujourd’hui entravé pour de nombreux Grand-Parisiens en raison des restrictions de déplacement, il faut dès à présent penser à la manière d’y répondre dans le long terme. Et ceci passe par la valorisation des ressources existantes encore souvent méconnues. Car l’Île-de-France n’est pas la région que l’on croit. Vue du coeur de la métropole, on la perçoit tel un gigantesque ensemble urbain. Pourtant, la ville ne compose qu’un quart de son territoire. A l’opposé de l’image que l’on peut en avoir, l’Île-de-France est constituée avant tout de terres agricoles (50% de sa surface) et possède également un quart de sa surface recouvert de bois et de forêts. A elles-seules, les forêts publiques représentent ainsi 91.000 terrains de football. Une richesse qui constitue un atout fondamental au regard notamment du réchauffement climatique. En 2009, un rapport publié par Natural England concluait que moins de 10% des enfants jouaient dans des espaces naturels contre 40% des adultes lorsqu’ils étaient jeunes. Le rapport remarquait également que le rayon d’itinérance des enfants à partir du domicile avait baissé de 90% en 30 ans.
Rendre l’information disponible dans l’espace public
Pour permettre aux Grand-Parisiens de se réapproprier cette ressource, l’un des enjeux est d’agir sur la carte mentale que l’on a de la région et rendre l’information disponible dans l’espace public. Ce qui pourrait se traduire par l’installation, sur les grilles des parcs et des squares de Paris et de petite couronne, d’une carte des forêts accessibles en train. Paris compte pour ce faire 500 parcs, squares et jardins tandis que le nombre de grands parcs urbains en petite couronne (parc de Sceaux, parc Georges-Valbon, parc de Saint-Cloud…) est de 31 (8 en Seine-Saint-Denis, 10 dans les Hauts-de-Seine et 13 dans le Val-de-Marne). C’est cette idée qu’Enlarge your Paris défend en association avec l’Office national des forêts, l’Agence des espaces verts d’Île-de-France, l’Office de tourisme du Pays de Fontainebleau et Transilien SNCF, et qui a été soumise au concours de projets urbains innovants FAIRE PARIS.
Cette carte serait conçue comme un élément pérenne de la signalétique urbaine afin de diffuser un autre imaginaire de l’Île-de-France. Outre les forêts publiques, la région possède quatre Parcs naturels (la Haute Vallée de Chevreuse, le Vexin français, l’Oise – Pays de France et le Gâtinais français) qui s’étendent sur 2700 km2, soit 27 fois Paris. Un cinquième parc est actuellement en cours de classement, celui de la Brie et des Deux Morin. Quant aux gares, l’Île-de-France en compte 380, ce qui en fait l’un des territoires les mieux desservi au monde. Des gares qui, en plus de connecter les urbains avec la forêt, leur permettent d’accéder à de nombreux sentiers de randonnée. Le tout, c’est de le savoir.
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19 novembre 2020