Ils et elles s’appellent Cassandra, Noor, Souleymane ou Emily. Ils et elles ont entre 12 et 19 ans. Ils et elles vivent chez leurs parents, au sein d’une famille d’accueil ou dans un centre d’hébergement pour mineurs isolés. Soit 21 jeunes à qui l’autrice Jo Witek et la photographe Juliette Mas ont rendu visite dans le cadre de l’espace où se déploie le plus leur intimité : leur chambre. De ce travail de longue haleine – quatre ans au total – résultent un livre, une série de podcasts et une exposition, « Chambres adolescentes », présentée jusqu’au 4 janvier au Centre Tignous d’art contemporain à Montreuil (Seine-Saint-Denis).
On entre dans cette expo comme on entrerait dans l’antre de ces ados : sur la pointe de nos gros pieds d’adultes. Car des textes aux photos en passant par les podcasts (à écouter sur tablette), tout dit la fragilité et la sensibilité de cet âge qui n’est peut-être pas, selon les mots de Paul Nizan, le plus bel âge de la vie, mais est sans doute l’un des plus intenses. On est ému devant le portrait de Liam, grandi trop vite à la suite d’un accident familial et dont la détermination sans faille touche au cœur. Tout comme le regard profond d’Asia sur son portrait entre en résonance avec sa réflexion sur son rapport au spirituel.
Dans l’intimité de leur cocon
D’un cliché à l’autre, des motifs reviennent : le rôle des écrans, les amis, le sport et l’amour, évidemment. Pour autant, l’exposition met bien en avant la singularité de chaque parcours, les tours et détours que chacun emprunte pour grandir au mieux. Et ce, en dépit du covid – le projet a débuté quasiment en même temps que le confinement –, des angoisses liées à l’inconséquence des adultes qui lèguent un monde sens dessus dessous et des aléas de la vie familiale.
Tandis que, après avoir connu l’exil, Mamadou est galvanisé par sa pratique de l’aviron, Maëlle se demande comment « sortir de cette société où tout le monde doit se ressembler ». Au passage, certains clichés sont foulés aux pieds par leurs baskets. Zoé, 14 ans, prise en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE) raconte combien, parfois « ça fait une sorte de break de pas être dans sa famille ». Touchants, révoltés, déterminés, dans l’intimité de leur cocon, ces ados mettent aussi les adultes que nous sommes face à eux-mêmes. Quand Jo Witek demande à Émily, 17 ans, harnachée dans ses vêtements comme si la vie était un combat, si elle a encore de l’espoir et que la jeune fille répond d’un simple « non », on a tout simplement envie de s’excuser auprès d’elle. Et de la prendre dans nos bras.
Infos pratiques : exposition « Chambres adolescentes », au Centre Tignous d’art contemporain, 116, rue de Paris, Montreuil (93). Jusqu’au 4 janvier. Ouvert le mercredi et le jeudi de 14 h à 18 h, le vendredi de 14 h à 21 h, le samedi de 14 h à 19 h. Entrée libre. Accès : métro Robespierre (ligne 9). Plus d’infos sur centretignousdartcontemporain.fr
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24 décembre 2024 - Montreuil