En quoi consiste l’appel à projets « La Belle Piscine » ?
Jean-Philippe Trigla : Depuis septembre dernier, la ville de Vitry (Val-de-Marne) s’est dotée d’un nouveau centre aquatique. Il se trouve que l’ancienne piscine, la piscine du 8-Mai-1945, est à l’abandon. Elle devrait être détruite mais, d’ici là, la mairie nous a sollicités pour porter un projet. Il consiste à y faire intervenir, du 19 septembre au 6 octobre prochains, une dizaine d’artistes dans les parties communes (vestiaire, douches, cabines…).
Les artistes doivent candidater d’ici au 15 août à minuit. Qu’attendez-vous d’eux ?
Il faut d’abord rappeler qu’ils seront extrêmement libres. Chacun travaillera avec son art à lui, qu’il s’agisse de peinture, de graff, de collage, de photo… Et bénéficiera d’un espace d’environ 15 m2. Nous avons juste deux exigences : que les artistes soient sensibles à la question de l’animation, car des temps d’ateliers et de visite à destination du public sont prévus, et qu’ils respectent la thématique, à savoir : « microcosmes aquatiques ».
Qu’entendez-vous par « microcosmes aquatiques » ?
Vitry est une ville d’eau. Son nom complet est « Vitry-sur-Seine ». Nous sommes situés dans un département appelé le Val-de-Marne. On remet à jour des sources qui avaient été enfouies ces dernières décennies. Et puis il y a cette fameuse piscine ! Et justement, avec ce thème, nous revenons littéralement aux sources. Les artistes sont très libres dans leur interprétation de cette thématique. On peut faire un zoom avant en évoquant la goutte d’eau. A contrario un zoom arrière en s’intéressant à la thématique de l’océan. Tout est permis, à condition d’être créatif et de porter l’idée du participatif.
Dans l’appel à projets, vous précisez qu’il s’agit d’une œuvre « mémorielle ». En quoi est-ce une démarche de mémoire ?
Actuellement, Vitry se renouvelle : pas mal de bâtiments, de résidences, disparaissent. La piscine, elle, a 53 ans et est également vouée à disparaître. L’idée, avec cet événement, est de faire le deuil d’un équipement sportif. De commémorer un espace qui a compté dans la vie de nombreux Vitriots car c’est là qu’ils ont appris à nager, ont passé de bons moments… C’est pourquoi nous tenons à ce que les habitants soient partie prenante du projet et que les artistes leur transmettent un peu de leur savoir-faire.
Justement, Vitry est une ville liée de longue date au street art. Comment cela se fait-il ?
Tout commence avec le 1 % artistique dans les années 60. La commune élargit le dispositif à l’ensemble des bâtiments publics. D’ailleurs, la piscine du 8-Mai-1945 en a bénéficié : l’artiste Mariano Hernandez y a élaboré des peintures murales en 1969. À Vitry, qu’il s’agisse d’art urbain ou d’art contemporain, l’art est partout. En matière d’art urbain, dans les années 2010, une nouvelle impulsion est donnée par l’artiste vitriot C215 et Djamel Meftah qui décident de transformer les rues de la commune en galerie à ciel ouvert. Ils organisent plusieurs « Vitry Jam », c’est-à-dire des œuvres collectives sur des murs autorisés. En un sens, le graff et le street art viennent régénérer cette notion d’art populaire portée en son temps par le 1 % artistique. N’oublions pas non plus que Vitry est un bastion de la culture hip-hop avec le collectif Mafia K’1 Fry mais aussi le groupe 113. On est donc sur des terres fertiles !
Qu’en est-il aujourd’hui du street art à Vitry ?
Après le départ de C215 de Vitry, il faut bien admettre que les choses se sont un peu endormies. Mais c’est en train de repartir. Avec cet appel à projets, la ville se saisit du sujet et répond à une demande des habitants qui ont envie de voir leur ville colorée. Nous en sommes au début, le mouvement va se préciser, s’amplifier. Un point me semble important à rappeler : il faut continuer à venir à Vitry, à soutenir les artistes, à soutenir la création. Car il s’y passe de belles choses !
Infos pratiques : appel à projets « La Belle Piscine » jusqu’au 30 août à minuit. Dossier de candidature disponible sur services-vitry94.fr
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18 juillet 2022 - Vitry-sur-Seine