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Librairies de créateurs : le match Lagerfeld vs Saint Laurent

La librairie Le 7L a été fondée en 1999 par Karl Lagerfeld / © Virginie Jannière pour Enlarge your Paris

Vous avez envie de plonger dans un monde chic et de bon goût ? Optez pour les librairies des grands couturiers. La librairie Saint Laurent Babylone vient d'ouvrir à deux pas du 7L, celle fondée par Karl Lagerfeld en 1999. Déco, accueil, choix éditoriaux… Laquelle gagnera le match ?

Le 7L, la librairie de Karl Lagerfeld, le sur-mesure et la démesure

La déco : Uniquement quelques miroirs, deux ou trois cadres et l’absence presque totale de rayonnages. Ici les livres sont disposés à plat, souvent en piles. « Karl pensait que placer les ouvrages dans des étagères empêche la découverte. La couverture du livre doit être visible pour attirer l’œil », explique Vincent Puente, fondateur de la librairie aux côtés du grand couturier. Pour la petite histoire, Karl Lagerfeld a créé la librairie du 7L en 1999 afin de partager avec tous ses goûts en matière d’architecture, de jardins, de design et d’art.

L’accueil : « Venez comme vous êtes » ou presque. Pas besoin de prendre rendez-vous ou de se mettre sur son 31 pour entrer au 7L. En revanche, un discret bouton permet d’ouvrir la porte vitrée avant d’entrer. Un détail qui signifie à tous qu’on n’y rentre peut-être comme dans un moulin. Le libraire en poste ce jour-là se montre précis et érudit, son allure sobre et distinguée. Accaparé entre demandes aux téléphones et conseils en librairie, il reste courtois en toute occasion : le comble du chic.

Le fonds : Ici, l’expression « luxe, calme et volupté » n’est pas galvaudée : Charlotte Perriand, André Dubreuil, Le Corbusier, Mark Rothko, Sophie Calle… Une myriade de beaux livres sur les architectes, designers, céramistes, artistes, peintres, plasticiens défilent sous nos yeux. On peut ici commander ce que l’on souhaite, nous précise-t-on. Bon, on se voit quand même mal commander le dernier Marc Levy face aux livres sur le jardin zen d’Erik Borja ou les céramiques de René Buthaud. Étonnant et un brin décevant : seul un petit coin de la librairie est réservé à la mode. « Karl partait du principe que, si l’on se targue de connaître la mode, alors il n’est pas besoin de se nourrir de ce genre de livres. Mieux vaut s’inspirer des autres arts », précise Vincent Puente. En revanche, les libraires ont sorti du coin mode les biographies du génial couturier pour mieux les mettre en avant.

Les gens : On y a croisé des étudiants, une femme dont la recherche en architecture semblait assez pointue et surtout quelques curieux qui, comme nous, n’ont pas fait flamber leur portefeuille. À propos de portefeuille bien garni, pour ceux que ça intéresse, la librairie propose de constituer des bibliothèques selon le goût du client qui en fait la demande. « Nous avons créé la bibliothèque du restaurant Le Jules Verne qui ne contient que 10 livres et Karl avait entièrement créé celle d’un hôtel de Macao contenant plus de 4 000 ouvrages ! À vous de nous dire ce que vous souhaitez ou… la taille de votre appartement ! », lance le libraire dans un éclat de rire. Bon, on l’avoue, on va peut-être se cantonner à notre bonne vieille Billy Ikea en attendant l’inspiration.

Infos pratiques : Le 7L, 7, rue de Lille, Paris (7e). Ouvert du mardi au samedi de 10 h 30 à 19 h. Accès : métro Saint-Germain-des-Prés (ligne 4) et Rue du Bac (ligne 12). Plus d’infos sur librairie7L.com

La boutique Saint Laurent Babylone, rue de Grenelle à Paris/ © Joséphine Lebard pour Enlarge your Paris

Saint Laurent Babylone, librairie mais pas seulement…

La déco : Flambant neuve, la boutique est habillée de béton brut et d’étagères de marbre. Une longue table de bois blond permet de se poser pour consulter les ouvrages disponibles. Bienvenue dans un univers épuré, élégant mais aussi un brin intimidant, il faut bien l’avouer.

L’accueil : Un sans faute. Première fois que, dans une boutique, on se dirige vers nous pour nous demander : « Comment puis-je vous faire plaisir aujourd’hui, Madame ? » Ah oui. Carrément. Il n’y a pas à dire, le luxe, ça a du bon. Surtout quand, dans la foulée, on nous propose un café. Puis, ensuite, de nous faire faire le tour du magasin afin de nous en expliquer le concept. On aurait presque envie de brandir notre relevé bancaire devant les yeux de la charmante vendeuse pour lui montrer qu’il y a erreur sur la personne (et ses capacités financières).

Le fonds : Soyons clairs, Saint Laurent Babylone n’est pas « juste » une librairie, plutôt un concept-store avec une large place attribuée aux livres. En l’occurrence aux livres d’art. On y trouve les ouvrages édités par la maison de couture elle-même, consacrés à des artistes contemporains. Des monographies sur Basquiat, Diane Arbus, Nan Goldin ou William Klein sont disposées sur des étagères qui ne croulent pas sous une offre pléthorique. Les livres de Juergen Teller sont largement représentés ; on nous signale d’ailleurs que le photographe sera en dédicace à la boutique le 28 février de 17 à 19 heures. On regrette de ne pas trouver davantage de clins d’œil à l’univers de Saint Laurent, avec par exemple les œuvres de Proust auquel le couturier vouait un véritable culte. Certes, il y a bien un livre consacré à Betty Catroux, l’une de ses muses, une monographie de Matisse qui inspira certaines de ses créations. Mais pourquoi n’y a-t-il pas, par exemple, l’édition de Madame Bovary, illustrée par ses dessins de jeunesse et parue en 2021 chez Gallimard ? Un large espace est aussi affecté aux vinyles avec une sélection assez baroque. On y trouve la B.O. des derniers défilés de la maison, mais aussi les plus vintage Donna Summer et Bryan Ferry qui voisinent dans les bacs avec Michel Fugain ou… Sophie Favier. On peut aussi s’offrir un stylo-bille signé YSL (50 € quand même) ou une cup pour son café du matin (95 €). De quoi affoler le tensiomètre sans avoir ingéré une seule goutte de son macchiato

Les gens : Ouverte depuis à peine deux semaines, la boutique attire les instagrameurs qui s’en donnent à cœur joie. Comme dans les boutiques de luxe, chacun déambule dans un silence quasi religieux, à peine troublé par la musique d’ambiance. Outre le cadre, on sait qu’on n’est pas chez Gibert quand on saisit à la volée ce genre de phrase : « J’adore Raf Simons, mais quand je vois ce qu’il fait chez Prada… C’est pas du Prada, quoi ! »

Infos pratiques : Saint Laurent Babylone, 9, rue de Grenelle, Paris (7e). Accès : métro Sèvres–Babylone (lignes 10 et 12). Ouvert du mercredi au samedi de 11 h à 19 h, le dimanche de midi à 19 h. Plus d’infos sur ysl.com

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