Quelle est l’histoire de la friche qui abrite Les Jardiniers ?
Adrien Van Melle-Nehama : Ce bâtiment industriel est une ancienne usine d’armement construite dans les années 1900 par le groupe Ratier pour y fabriquer des hélices. Après la Seconde Guerre mondiale, il a été récupéré par la Ville de Montrouge pour stocker le matériel des jardiniers municipaux et leurs plantes, le site étant baigné par la lumière grâce à son architecture type Eiffel et ses grandes baies vitrées. D’où le nom, Les Jardiniers. Juste avant la crise sanitaire, la mairie avait lancé un appel à projets pour redynamiser. C’est L’Atelier des jardiniers qui l’avait emporté mais nous avons finalement repris le projet il y a un peu plus d’un an en y ajoutant une touche « art contemporain ». Car c’est de là que je viens ,de même que certains cofondateurs comme l’artiste Fabrice Hyber qui, depuis une trentaine d’années, traite de l’écologie et du vivant à travers ses oeuvres.
Quel est le rôle de Fabrice Hyber dans cette aventure ?
C’est lui qui nous inspire. Le lieu s’est construit autour de son travail. Il est arrivé assez vite dans l’équipe. On discute beaucoup avec lui mais, avec ses expos dans le monde entier, il ne peut pas être dans l’opérationnel, contrairement à Christophe Vix-Gras (fondateur des Rosa Bonheur, Ndlr), Henri Van Melle et moi-même.
Que va-t-on pouvoir faire aux Jardiniers ?
Sur 600 m2 de bâti, 350 m2 sont dévolus à la programmation artistique. Chaque année seront organisés quatre temps forts autour de l’art contemporain, parallèlement à de plus petits événements. En collaboration avec la Ville, nous y exposerons une partie du Salon de Montrouge. En plus de cela, nous avons prévu d’accueillir des salons, des conférences, des tables rondes et des projections de films. La Cantine, le restaurant bar, occupera la seconde partie du site. Nous y proposerons des produits locaux, de saison et bios, dans la mesure du possible. Nous avons voulu penser à une cuisine simple mais engagée car nous voulons, à travers les expos et l’offre culinaire, sensibiliser à l’écologie. D’ailleurs, ce sera le thème de notre exposition inaugurale.
Faire d’une ancienne friche industrielle un lieu hybride, dévolu à l’art et à la gastronomie, est-ce une manière de décloisonner l’art contemporain ?
Oui. Nous ne voyons pas ce site comme un restaurant qui proposerait des expositions mais un lieu d’art où l’on peut trouver de la vie. J’espère qu’on y verra un public varié qui ne se limite pas aux amoureux d’art contemporain. D’abord parce que l’on espère faire venir un public plus local. C’est un pari car l’immense majorité des lieux qui exposent des œuvres artistiques sont publics ou subventionnés. Pour l’instant, nous comptons beaucoup sur la partie restauration pour pouvoir subsister et diversifier le public. Pour cela, il faut tenter d’être plus didactiques, plus ouverts. Par exemple, tous les dimanches, une médiatrice proposera des visites de l’exposition en cours ; il y aura aussi régulièrement des ateliers pour enfants. Le premier dimanche de chaque mois, nous organiserons des « goûters électro », de quoi se détendre sans rentrer à trois heures du matin ! Mais nous avons aussi prévu quelques soirées festives, à commencer par ce samedi, jour de l’ouverture, avec des DJ sets jusqu’à une heure du matin !
Votre exposition inaugurale s’appelle « No Future ». C’est à la fois très pessimiste comme titre et en même temps contestataire…
Nous avons voulu planter le décor : à travers les œuvres d’artistes reconnus et d’autres moins connus, nous avons souhaité confronter les regards sur les conséquences possibles du réchauffement climatique. Mais, vous l’avez compris, ce titre est aussi un clin d’œil au mouvement Punk des années 1980 et aux coups de gueule parfois nécessaires pour mieux faire bouger les choses. Donc, évidemment, il y a de la colère et du désespoir dans ces regards sur le monde qu’on laisse aux générations futures, mais aussi du désir pour trouver des solutions. Ce lieu n’est qu’un prolongement de notre manière de voir le monde. J’espère qu’elle saura séduire.
Infos pratiques : Les Jardiniers, 11, rue Paul–Bert à Montrouge (92). Vernissage le 27 avril de 17 h à 1 h. Ouvert tous les jours de 10 h à 18 h, les mercredis et vendredis jusqu’à 23 h. Entrée gratuite. Accès : métro Barbara (ligne 4). Plus d’infos sur lesjardiniers.org
Lire aussi : Cinq musées du Grand Paris où vous ne ferez pas la queue
Lire aussi : Le TLM : un tiers-lieu tel qu’on les aime
Lire aussi : Les expos street art qui vont vous en mettre plein les yeux
26 avril 2024 - Montrouge