La Closerie Falbala, un objet architectural non identifié

Quand Jean Dubuffet a acheté ce terrain avec une roseraie, la Bastille (11^e) n’abritait pas encore un opéra mais une gare d’où partait un train qui venait jusqu’ici, et Périgny (Val-de-Marne) était encore la capitale des roses. Il n’y a plus aujourd’hui ni roses ni gare, mais il reste les œuvres de Dubuffet. C’est ici que cet artiste total – peintre, sculpteur et architecte – produisait ses grands volumes, ses maquettes, ses immenses sculptures de résine, et que la Fondation Dubuffet conserve son travail et sa mémoire.

L’endroit ne paie pas de mine. Pour y accéder, on passe un portail banal, comme on en voit partout en banlieue. Le terrain descend vers la rivière de l’Yerres, appréciée des artistes comme Caillebotte. La maison de famille du peintre impressionniste était à quelques kilomètres de là et il aimait y organiser des parties de campagne avec ses amis. La comparaison avec Caillebotte s’arrête là. La maison de Dubuffet est un pavillon de béton carré et simple, avec des ouvertures lumineuses comme dans les usines du XX^e siècle. La Closerie Falbala était un lieu de travail, pas une maison de week-end.

Une allée gravillonnée mène à trois bâtiments quelconques au milieu desquels, sur une pelouse minimaliste, on découvre des sculptures immenses. C’est ici qu’ont été créées les œuvres emblématiques de Dubuffet, comme le Groupe de quatre arbres, une sculpture de 14 mètres de haut commandée par le milliardaire américain John Rockefeller pour le siège d’une banque de New York. Dubuffet avait choisi Périgny en raison de la proximité des ateliers de Robert Haligon, spécialiste de la résine et créateur d’une « machine d’agrandissement » qui permettait d’augmenter mécaniquement la taille d’une œuvre pour en faire l’un de ces grands formats qu’aimait tant Dubuffet. Il y en a partout, et de toutes tailles. Dans un recoin, on tombe sur l’esquisse XXL d’une sculpture inachevée pour La Défense (Hauts-de-Seine) retrouvée par hasard il y a quelques années dans un sous-sol du quartier d’affaires.

L’une des plus grandes œuvres d’art contemporain du Grand Paris

À l’intérieur des bâtiments, on découvre des maquettes d’architecture et des projets de monuments dans les anciens ateliers de sculpture transformés en salles d’exposition. Les peintures sont présentées dans un bâtiment spécialement construit pour elles. La richesse des œuvres exposées est spectaculaire. C’est un vrai musée installé à l’endroit même où l’artiste créait. Pourtant, ce n’est pas tout : le chef-d’œuvre de Dubuffet est un peu plus loin, sur un autre bout de terrain, que l’on rejoint en marchant quelques minutes : la Villa Falbala, gigantesque sculpture de 8 mètres de hauteur entièrement peinte en blanc avec des tracés noirs, organisée sur un plateau de 1 610 m² en résine stratifiée posée sur un revêtement de béton.

Comment la décrire ? La Villa Falbala, comme la Tour aux figures sur l’Île Saint-Germain à Issy (Hauts-de-Seine), est l’une des plus grandes œuvres d’art contemporain du Grand Paris. Il faut aller la voir avant que ne débute bientôt un long chantier de restauration. Pour ses 50 ans, la Fondation a décidé d’offrir une nouvelle jeunesse à l’œuvre majeure de Dubuffet.

Infos pratiques : Closerie Falbala, sente des Vaux, Périgny-sur-Yerres (94). Ouvert les samedis et dimanches (sauf jours fériés) et du mercredi au dimanche durant les vacances de la Zone C. Durée de la visite : 1 h 30 (collections et Closerie Falbala). Tarifs : 8 € (plein tarif), 4,50 € (tarif réduit), gratuit pour les moins de 10 ans. Réservation obligatoire par téléphone : 01 47 34 12 63 (en semaine), 06 26 94 42 25 (samedi-dimanche). Accès : gare de Boissy-Saint-Léger (RER A) puis taxi ou autobus 23 arrêt La Plaine / gare de Boussy-Saint-Antoine (RER D) puis taxi ou 20 min à pied en suivant notre balade « Le long de l’Yerres, au fil de l’eau et de l’art ». Plus d’infos sur dubuffetfondation.com