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Dans l’intimité de l’intime au musée des Arts décoratifs

Avec « L'intime, de la chambre aux réseaux sociaux », le musée des Arts déco à Paris questionne notre rapport à l'intimité / © Musée des Arts décoratifs
Avec « L’intime, de la chambre aux réseaux sociaux », le musée des Arts déco à Paris questionne notre rapport à l’intimité / © Musée des Arts décoratifs

À l'heure où l'intimité ne s'est jamais autant exposée et racontée, le musée des Arts décoratifs à Paris passe en revue les lieux et les façons dont se déploie la vie privée occidentale du XVIIIe siècle à aujourd'hui.

La scénographie ne laisse pas de place au doute. Un trou de serrure géant ouvre l’exposition « L’intime, de la chambre aux réseaux sociaux », à voir jusqu’au 30 mars au musée des Arts décoratifs à Paris (1er). Du XVIIIe siècle à nos jours, elle ausculte les lieux et les façons dont se déploie la vie privée occidentale. L’occasion d’admirer de très belles toiles, de Vuillard ou Hammershøi, rappelant que, au XIXe, intimité et féminité vont de pair. Selon l’idéal bourgeois, tandis que l’homme rayonne à l’extérieur, la femme, elle, est priée de se cantonner à la sphère domestique.

Chambre, toilettes ou salle de bains… La force du musée des Arts déco réside évidemment dans sa capacité à rassembler des objets qui racontent leur époque. Tel le fameux lit bateau, produit en série sous Louis-Philippe et dont on trouve encore aujourd’hui des exemplaires dans bien des maisons de campagne. Plus surprenante, une riche collection de… pots de chambre, également appelés des bourdaloues. Ils ont été baptisés ainsi d’après un célèbre jésuite du XVIIe dont les sermons interminables lors de la messe obligeaient les dames à se munir du fameux ustensile pour satisfaire une envie pressante. Une élégante armoire signée Eileen Gray ou un miroir furieusement pop dessiné par Ettore Sottsass disent tour à tour la sobriété ou l’exubérance que chacun recherche pour sa « chambre à soi ». Pots à mouches du XVIIIe, nécessaire de toilette signé Vuitton ou poudrier surmonté d’une plantureuse couronne rappellent que l’espace privé est aussi le lieu de la construction de son personnage social.

 
 
 
 
 
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Une salle consacrée aux journaux intimes

La section la plus impressionnante de l’exposition est sans nul doute celle consacrée au design des années 50 à aujourd’hui : fauteuils, lits et canapés symbolisent l’envie de cocooner. Elle est poussée à l’extrême avec La Cova (1972) de Gianni Ruffi, véritable nid de deux mètres de diamètre réalisé à partir de chutes de tissu dans lequel on se loverait bien volontiers tout l’après-midi. Tout comme La Mamma (1969), fauteuil de Gaetano Pesce aux formes maternelles suggestives. Et, si le monde est définitivement trop dur, on peut refermer sur soi le Cabriolet-Bed (1969) de Joe Colombo, dont la capote se descend. D’autant que le lit comprend une station météorologique ou encore une radio. Bref, de quoi demeurer (un peu) en lien avec l’extérieur.

Si la pièce dévolue aux influenceurs ne convainc pas car ces derniers proposent un discours très convenu sur la notion d’intimité, en revanche l’ultime salle, consacrée aux journaux intimes, se révèle passionnante. Elle donne notamment l’occasion de découvrir Ariane Grimm, véritable Mozart du « diarisme » – la pratique du journal intime –, disparue prématurément. Elle permet de boucler joliment cette exposition, laissant entendre que, bien entendu, plus que dans une chambre ou une salle de bains, la matrice de notre intimité, c’est notre intériorité.

Infos pratiques : exposition « L’intime, de la chambre aux réseaux sociaux » au musée des Arts décoratifs, 107, rue de Rivoli, Paris (1er). Jusqu’au 30 mars. Ouvert tous les jours de 11 h à 18 h sauf le lundi. Nocturne jusqu’à 21 h le jeudi. Tarif : 15 € (plein tarif), gratuit pour les moins de 18 ans. Accès : métro Palais Royal–Musée du Louvre (lignes 1 et 7). Infos et réservations sur madparis.fr

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