On les connaît bien souvent parce qu'ils et elles ont donné leurs noms à des rues ou à des collèges. Mais qui sont ces personnalités ayant œuvré pour la démocratisation du sport et qu'ont-elles fait ? L'exposition « Figures militantes du sport populaire » les raconte jusqu'au 26 avril à l'Humathèque du Campus Condorcet à Aubervilliers.
Sur le Campus Condorcet à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), de grandes figurines de nageurs, footballeurs, cyclistes et autres sportifs saluent les visiteurs. Comme un préambule à l’exposition « Figures militantes du sport populaire » qu’accueille l’espace Françoise-Héritier, au sein de l’Humathèque du Campus.
Au fil de l’exposition, on découvre ainsi des figures dont les noms évoquent davantage un nom de rue ou de collège et dont il est possible, désormais, de connaître plus précisément le parcours. Comme Auguste Delaune (1908-1943) : cet ouvrier soudeur, pratiquant le cross, a œuvré à la mise en œuvre du programme sportif du Front populaire. Il a contribué à la constitution, durant la guerre, du journal clandestin Sport Libre et mourra torturé par la police allemande en 1943. Elle aussi résistante, l’aviatrice Adrienne Bolland a soutenu, également sous le Front populaire, un programme rendant accessibles les sports aériens aux jeunes quelles que soient leurs origines sociales. Au gré des sportifs et sportives représentés, on voit combien activité physique et militantisme sont étroitement mêlés. Chargé de développement à la Fédération sportive et gymnique du travail 93 (FSGT), une fédération née en 1934, Yohan Massot souligne qu’ « il ne faut pas oublier l’Histoire. La montée du fascisme, c’est quelque chose qui revient. Le fascisme a souvent essayé d’instrumentaliser les pratiques physiques. Il est donc bon de rappeler au public le souvenir de gens qui ont été à la base de sports pratiqués selon des valeurs sociales et humanistes. »
Une exposition qui met en avant les femmes
Dans cette logique, les vastes figurines imaginées par l’illustrateur Fred Sochard constituent une excellente porte d’entrée. Installées dans des espaces publics, ces représentations se doivent d’être tout de suite comprises. « Il faut garder les détails signifiants et enlever ce qui ne l’est pas », résume l’artiste. Qui mise aussi sur « des couleurs fortes pour attraper le regard. De toute façon, l’univers du sport est plutôt très coloré, non ? » Mais comment éviter que ces personnalités, issues des années 20 et 30, aient l’air trop figées ? D’autant que les photos de l’époque ne brillent pas par leur naturel… « Pour Kléber Sory qui fut un des instigateurs d’un Paris-Roubaix ouvrier, je n’avais qu’une photo de groupe où on le voyait à peine. Cela m’a néanmoins suffi pour capter l’ossature de son visage et le dessiner. Concernant Ange Casanova, agent EDF et cofondateur du club Gazélec Ajaccio, je n’avais que des photos de lui âgé. Je l’ai rajeuni. En revanche, au sujet de la basketteuse Carmen Crespo qui a combattu durant la guerre d’Espagne, je n’avais aucune source iconographique. Alors je l’ai imaginée… »
C’est d’ailleurs l’une des forces de l’exposition : mettre en avant de nombreuses figures féminines. Qui sait par exemple que, à l’origine de la fameuse école de voile Les Glénans, il y a une femme, Hélène Viannay ? Grâce à elle, ils sont nombreux à avoir découvert les plaisirs de la navigation. Et qui sait que sans Lucienne Richard, épicière et aux origines de l’Union sportive du travail d’Ivry (USTI), le vélo-polo ne se serait sans doute pas autant implanté en France ? Sans oublier Marie Houdré qui a développé le rugby féminin dès les années 20 au sein du club Fémina Sport. On ressort de cette exposition ludique et bien pensée avec un double élan : se bouger pour soi mais aussi pour les autres.
Infos pratiques : exposition « Figures militantes du sport populaire » à l’Humathèque et sur tout le Campus Condorcet, 10, cours des Humanités, Aubervilliers (93). Jusqu’au 26 avril. Ouvert du lundi au vendredi de 8 h à 20 h, le samedi de midi à 18 h. Entrée libre. Accès : métro Front Populaire (ligne 12). Plus d’infos sur sportpopulaire.campus-condorcet.fr
Lire aussi : Quand Doisneau aidait et photographiait la Résistance
Lire aussi : Deux banlieusards dévoilent leurs pépites urbex
Lire aussi : Je vais vous conter l’histoire de mon musée préféré : Nissim de Camondo
12 décembre 2023 - Aubervilliers
