Comment définiriez-vous votre pâtisserie ?
Rémi Bouiller : Oh, la question piège ! C’est un peu comme parler de soi, c’est compliqué. S’il fallait définir mon travail, je dirais que je propose de la pâtisserie contemporaine, donc répondant aux nouveaux codes un peu moins lourds et moins sucrés de la pâtisserie de nos aînés. Je respecte néanmoins les traditions en jouant avec les grands classiques. Je n’utilise aucun colorant et je base mes créations sur la saisonnalité. Par ailleurs, j’ai à cœur de jeter le moins possible. Dernièrement, j’ai créé la tarte Hera, pour laquelle j’ai utilisé le trognon de la poire, sa peau et même la tige. Lors du festival Omnivores 2022, j’ai imaginé un dessert « zéro déchet » contenant notamment un sorbet créé à partir de la feuille d’une main de Bouddha.
Votre parcours est assez classique, votre look un peu moins. Le monde de la pâtisserie a-t-il évolué ?
J’ai toujours voulu devenir pâtissier et j’ai d’ailleurs commencé ce métier à 15 ans. Il est vrai que, il y a quelques années, la pâtisserie était enfermée dans des carcans assez rigides. Après ma formation, j’ai travaillé pour des maisons plutôt classiques comme Angelina à Paris. J’ai ensuite eu la chance de travailler auprès de Benoît Castel chez Liberté dans le 10e ou encore auprès de Carl Marletti, élu notamment meilleur pâtissier de France en 2009. Aujourd’hui, on peut s’assumer, aimer sortir, être tatoué, écouter du rap, travailler en banlieue et effectuer un travail tout aussi respecté. Et de plus en plus de pâtissiers s’y installent. D’ailleurs, chez Enlarge your Paris, vous êtes bien placés pour savoir qu’il se passe plein de choses au-delà du périph !
Pourquoi avoir choisi Montrouge ?
Je suis moi-même d’une ville de banlieue, à côté de Corbeil-Essonnes (Essonne). Je dois avouer que je n’étais pas à l’aise à l’idée d’ouvrir ma pâtisserie dans Paris. J’ai toujours considéré que la banlieue avait le droit de posséder de belles adresses. On peut me rétorquer que s’installer à Montrouge (Hauts-de-Seine) n’était pas un grand risque, à deux pas de la porte d’Orléans ! Mais je peux vous dire que certains Parisiens ne passent toujours pas le périphérique. Je propose actuellement mes pâtisseries aux Galeries Lafayette Gourmet (9e) et j’entends encore beaucoup de discours condescendants ! Je me bats avec ces clichés mais il y a encore du chemin à faire.
Le top 3 d’Enlarge your Paris chez Kreme :
La tarte Hera (6 euros)
Un mélange de crème d’amandes, poires pochée, compotée de poires, poire rôtie, gelée de shiso mais surtout une astuce zéro déchet : toute la poire est utilisée de la peau au trognon (dans la compotée). Le résultat : un goût de poire intense qui passe bien devant le sucre et une tarte sans colorant, d’un joli rose grâce à la gelée au shiso. Bravo. Si la tarte Hera tient son nom de la déesse grecque qui reçut en cadeau de mariage un arbre couvert de pommes d’or, Rémi Bouiller a mixé les références : « Je suis également un grand fan de culture urbaine, alors la mythologie n’est pas la seule raison : il y a peu, le rappeur Georgio a sorti un album qui s’appelle Hera. J’ai d’ailleurs réussi à lui faire déguster ma tarte ! »
Andoa (6 euros)
Une mousse au chocolat noir 70 % posée sur un brownie, rehaussée d’un insert praliné. Pas de risque pour vos gâteaux du dimanche : Andoa plait à tous les puristes du chocolat. Encore une fois, peu de saveur sucrée et beaucoup d’onctuosité. On adore l’esthétique du gâteau avec ses très élégants pétales de chocolat.
L’éclair cacahuète (6 euros)
Sorti au moment du Salon du chocolat il y a trois ans, « l’éclair cacahuète n’est jamais reparti de la carte et est même devenu le classique de chez Krème », confie Rémi Bouiller. Composé d’un crémeux au chocolat au lait, de praliné à la cacahuète et de cacahuètes caramélisées, cet éclair reste réservé aux super gourmands qui apprécieront aussi les petits cristaux de fleur de sel sur le dessus.
Infos pratiques : Krème, 8, place Émile Cresp, Montrouge (92). Ouvert du mercredi au vendredi de 8 h à 19 h, samedi et dimanche de 9 h à 19 h. Accès : métro Mairie de Montrouge (ligne 4) / tramway T3a arrêt Porte d’Orléans. Plus d’infos sur kreme.fr
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1 mars 2023 - Montrouge