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« La vie HLM », une expo grandeur nature à la cité Émile-Dubois

La cuisine de l'appartement témoin de l'expo "La vie HLM" à Aubervilliers / © AMuLoP
La cuisine de l’appartement témoin de l’expo « La vie HLM » à Aubervilliers / © AMuLoP

Comment vivait-on dans un HLM de la banlieue parisienne dans les années 60 ? En ouvrant les portes d'un appartement reconstitué au sein de la cité Émile-Dubois à Aubervilliers, l'association AMuLoP plonge le visiteur dans l'histoire du logement populaire.

À la cité Émile-Dubois à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), franchir la porte de l’appartement 176 provoque un léger vertige. Dans le salon, le poste de TSF attend d’être allumé. Dans la cuisine, le buffet Norma fait face à la table en Formica. Sur le rebord de l’évier, un paquet de Persavon guette l’heure du lavage des mains. Dans la chambre des enfants, les Bibliothèque rose et verte voisinent avec un 45 tours d’Adamo. Bienvenue en 1967, chez la famille Croisille. Une famille qui a véritablement habité la cité durant les Trente Glorieuses.

Elle est pas blême, l’histoire du HLM

L’appartement 176 s’inscrit dans l’exposition « La vie HLM », imaginée par l’AMuLoP, l’Association pour un musée du logement populaire. Comme son nom le laisse entendre, l’association milite pour la création d’un lieu pérenne consacré à l’habitat populaire. « Parmi nous, il y a beaucoup d’enseignants du secondaire », raconte Sébastien Radouan, enseignant-chercheur à l’École nationale supérieure d’architecture Paris-Villette et coordinateur scientifique du projet. « Ce passé du logement populaire est non seulement méconnu mais aussi peu valorisé. Or, pour certains élèves, comment s’ancrer dans une société quand on ne sait pas d’où l’on vient ? »

Pour monter ce projet, l’AMuLoP s’est inspirée du Tenement Museum de New York. « Le tenement est une typologie du bâti new-yorkais qui a vu se succéder les vagues migratoires », éclaire Sébastien Radouan. À terme, l’association souhaiterait installer le musée dans un bâtiment emblématique qui embrasse l’histoire de l’habitat de la révolution industrielle jusqu’à aujourd’hui. Pour que ce musée voie le jour, l’exposition a une mission décisive : « Nous croyons en l’écho qu’elle peut avoir pour convaincre les décideurs politiques et financiers. »

Un exposition qui se déploie dans trois appartements de la cité Émile-Dubois, prêtés par l’Office public HLM de la ville d’Aubervilliers. Le premier héberge le site d’accueil où l’on peut se plonger dans l’histoire urbaine d’Aubervilliers et, plus spécifiquement, la naissance de la cité, avec une maquette, des documents et des témoignages filmés d’anciens habitants. Ensuite, à chacun sa visite : soit celle intitulée « Trois familles, une histoire des quartiers populaires » soit celle consacrée aux Croisille, « Histoire d’une famille ouvrière ».

L'appartement témoin de l'expo "La vie HLM" à Aubervilliers / © AMuLoP
© AMuLoP

« C’est Versailles, ici ! »

Au-delà de la sensation étonnante de se retrouver propulsé en pleine année 1967 dans l’intimité de la famille Croisille, c’est le dispositif même qui séduit. Une guide nous fait déambuler de pièce en pièce en nous contant l’histoire des Croisille et des politiques sociales. Grâce à un impressionnant travail de plongée dans les archives, voici qu’apparaît sous nos yeux la lettre de remerciements de Jacqueline Croisille au maire d’Aubervilliers quand elle apprend qu’un logement leur a été attribué : « Il ne pouvait y avoir mieux comme cadeau de Noël ! », écrit-elle à l’édile. Il faut dire que, avant d’arriver dans les 51 m2 de la cité Émile-Dubois, la famille vit durant plusieurs années dans un logement insalubre de 9 m2, « sans eau ni gaz », comme le stipule un rapport social. D’où l’exclamation de joie de Jacques, le père, quand il franchit pour la première fois le seuil de son nouveau logement : « C’est Versailles, ici ! » Et on sourit devant le rapport dont Gérard, le fils de la famille, fait l’objet de la part du gardien de la cité. L’adolescent lui a, visiblement, « fait de la main un geste grossier et significatif ».

On s’en voudrait de déflorer une visite qui ménage des surprises et de vrais moment d’émotions. Tout au plus peut-on dire que, à travers les Croisille, c’est tout un pan de l’histoire qui se dévoile, des Trente Glorieuses à la crise des banlieues. Mieux encore qu’un livre pop-up !

Infos pratiques : exposition « La vie HLM » à la cité Émile-Dubois, allée Charles-Grosperrin, Aubervilliers (93). Jusqu’au 30 juin 2022. Visites « Histoire de trois familles » et « Histoire d’une famille ouvrière » réservables en ligne. Tarifs : 8 € (plein tarif) et 3 € (tarif réduit). Accès : Fort d’Aubervilliers (ligne 7). Plus d’infos sur laviehlm-expo.com

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