Depuis près d’un an, le journaliste John Laurenson partage avec nous son regard sur la banlieue à travers la série « Le Grand Paris est une fête », en hommage au Paris est une fête d’Ernest Hemingway.
C’est un fait suffisamment remarquable pour être souligné : dans ce quartier hors-sol qu’est La Défense (Hauts-de-Seine), puisque construit sur une dalle, l’art s’est enraciné entre les tours. Rien d’étonnant finalement lorsque l’on sait qu’il tient son nom d’une sculpture : un bronze qui répond au nom de « La Défense de Paris ». Coulé peu après la guerre franco-prussienne de 1870 à 1871, il commémore la résistance des troupes françaises contre l’avancée allemande. Si le rond-point où il trôna de longues années a disparu avec l’apparition des premiers buildings 100 ans plus tard, la sculpture s’est fait une place au cœur de cette cité verticale. Toucher le pied nu, blessé et enroulé de bandages du fantassin exténué représenté ici pour la postérité est donc une étape obligatoire. Depuis, quelque 70 autres œuvres sont venues s’ajouter.
Mais alors, comment partir à leur découverte sachant que naviguer à La Défense n’est pas chose aisée ? L’approche la plus simple est de commencer à la sortie du métro Esplanade de la Défense et de marcher jusqu’à la Grande Arche. Si vous y allez directement, vous verrez beaucoup de choses ; si vous y allez en zigzaguant, vous en verrez encore plus. La première œuvre qui se dresse sur votre chemin n’est autre que le Bassin Takis. L’artiste grec a fait pousser dans un bassin une autre skyline coiffée, elle, de formes abstraites aux couleurs primaires. L’effet est ludique, un brin enfantin dans ce quartier de grandes personnes en costumes.
Outre La Défense de Paris, plusieurs autres bronzes figuratifs se sont fait une place au pied des tours tel Icare d’Igor Mitoraj. Le héros grec se trouve ici sans ailes, sans bras, avec une moitié de sa tête, l’air troublé (on le comprend) mais quand même assez sexy. Vous tomberez aussi sur Le Pouce de César, un pouce de 12 mètres de haut qui n’est autre que la version XXL de celui du célèbre sculpteur, et sur La Terre de Louis Derbré, qui figure la rondeur de notre planète à partir de deux corps courbés.
Monstre et banc géant
Si à La Défense l’énormité des gratte-ciel joue déjà avec notre sens des proportions, le banc géant de Lilian Bourgeat, sur lequel vous pouvez vous hisser, fait de même puisqu’il est 2,5 fois plus grand qu’un banc normal, et qu’on s’y sent donc 2,5 fois plus petit. Idem pour l’Araignée rouge d’Alexandre Calder, dont les énormes pattes de devant (de l’araignée, pas du sculpteur) se posent délicatement sur l’esplanade. Non loin de là, devant la Grande Arche, aussi léger que l’Araignée est lourde, se trouve La Ronde de Daniel Buren (celui des colonnes en noir et blanc du Palais Royal), 16 mâts de 10 mètres de haut sur lesquels dansent des manches à air colorées. Multicolore aussi, La Cheminée Moretti déploie quant à elle ses 672 tubes en fibre de verre enrobée de plastique sur 32 mètres de haut.
Son créateur, Raymond Moretti, est aussi l’auteur de la sculpture la plus extraordinaire de La Défense, que le romancier Joseph Kessel a surnommée Le Monstre. Il vit reclus vingt mètres sous terre dans un atelier de 1 000 m2. De 1973 jusqu’à sa mort en 2005, Moretti le faisait grandir tous les ans. Maintenant, il demeure le plus souvent à l’abri des regards. Mais rien ne vous empêche de penser à lui lorsque vous arpenterez la dalle sous laquelle il repose…
Infos pratiques : la localisation des 73 œuvres sur l’esplanade de La Défense est à retrouver sur parisladefense.com. Accès : métro Esplanade de La Défense (ligne 1).
Lire aussi : L’incroyable histoire de l’Arche de La Défense mise en mots et en images
Lire aussi : La Tour aux figures, une œuvre immersive pensée comme une rando en montagne
Lire aussi : À Bobigny, un ancien garage métamorphosé en friche street art
Lire aussi : Avec « We are here », le street art s’invite entre les collections du Petit Palais
18 septembre 2024 - Puteaux