Une balade de douze kilomètres qui vous fera découvrir les bords de la Marne, de nombreux plans d’eau et les vestiges d’une glorieuse industrie chocolatière française. C'est la promesse de cette déambulation testée par l'équipe d'Enlarge your Paris au départ de Noisiel. On vous emmène ?
En partenariat avec Paris – Vallée de la Marne
À peine sorti de la gare de Noisiel (RER A), une large allée de tilleuls à l’écart de la circulation nous cueille. Au printemps, elle encadre une coulée de narcisses. Autrefois, elle menait au château de Noisiel désormais disparu. La ligne droite monte, descend et finit par s’ouvrir sur une perspective de la vaste pelouse du parc de Noisiel qui va en pente douce jusqu’à la Marne. À l’entrée du parc demeure la magnifique grille d’honneur en bronze et fer forgé du château défunt.
Avant de la franchir, regardez à droite : vous verrez une étrange tour, surnommée « tour de Babel ». Il est vrai que sa forme rappelle le tableau de Brueghel représentant la fameuse tour pensée pour toucher le ciel par des humains un brin mégalos dans la Bible. Mais ici, c’est en fait un château d’eau caché par un grillage qui monte en colimaçon. L’idée de l’architecte, Christian de Portzamparc (celui de la Cité de la musique à Paris), était que le grillage se couvre de lierre. Malheureusement, la végétation n’a que très moyennement coopéré et la tour est restée chauve comme le rocher du parc zoologique du bois de Vincennes.
La folle histoire du chocolat est née ici, sur les berges de la Marne
Dans le parc de Noisiel, la flore est plus conciliante, comme en témoigne les séquoia géants qui s’y épanouissent avec bonheur. C’est aussi le cas des hêtres pourpres, des bambous ou des érables. Au fond du parc, de belles ruines des usines du XIXe siècle se laissent deviner. Et on arrive au bord de l’eau, la vue est tout simplement à couper le souffle. On tombe sur une sorte de cité perdue de la Révolution industrielle : l’ancienne usine Menier, autrefois la plus grande chocolaterie du monde. Parmi les différents bâtiments de cet ensemble architectural, le plus grand est celui que les locaux appelaient « la cathédrale » à cause de sa magnifique taille. Mais le plus remarquable et le plus ancien est le moulin Saulnier, construit en 1872. Il utilisait l’énergie hydraulique de la Marne pour broyer les fèves de cacao afin de confectionner le chocolat. Perchée sur l’eau, avec les fines lignes noires de sa structure métallique apparente et ses briques émaillées sable rose aux motifs, dit-on, de la fleur de l’arbre à cacao, c’est certainement la plus jolie usine que le monde ait connue.
Bien préservé, le moulin Saulnier (il porte le nom de son architecte) se visite. On y apprendra beaucoup sur la folle histoire du chocolat français et la famille Menier – père, fils, petits-fils, arrière-petits-fils – qui ont contribué à la démocratisation du chocolat. Et pour cause : avant la fondation de la première entreprise Menier en 1816, la boisson était l’apanage de quelques têtes couronnées qui la sirotaient en décoction. Quelques décennies plus tard, ce n’est plus tout à fait la même chanson. En 1900, dans l’usine de Noisiel, 2 200 ouvriers produisent 70 tonnes de chocolat par jour. Dans les années 1950, ils sont encore 1 500. Si elle a perdu beaucoup de sa superbe, la marque existe encore pour le chocolat pâtissier. Sachez-le pour la prochaine fois que vous le croisez au supermarché : vous avez devant vous la marque qui a inventé le chocolat en tablette (sécable en carrés). Si vous êtes habitant de Seine-et-Marne, soyez fier : ça s’est passé près de chez vous !
On continue notre marche en longeant la Marne, rivière la plus longue de France. Le chemin est paisible, agréable, la présence de l’eau vivifiante ; l’ingénierie hydraulique, grâce à son jeu de barrages et de déversoirs, fait couler l’eau très rapidement par endroits. Je croise un coureur parisien qui vient souvent ici pour préparer son marathon. L’astuce, dit-il, est de venir en semaine, histoire de jouir pleinement de la tranquillité des lieux. Le week-end, il y a plus de monde.
On quitte la rivière, on traverse un bois, et on parvient devant quelques coquettes maisons en brique. C’est ce qui reste de la cité ouvrière bâtie pour les travailleurs du chocolat. Arrivé sur la belle et feuillue place Émile-Menier, on passe devant la mairie de la Cité Menier avant d’aller voir le monument aux morts qui se révèle être un monument… à un mort : Albert Menier. Quittant la place par la rue Albert-Menier, retournez-vous pour admirer une dernière fois la jolie mairie en briques. Sur le côté, au cas où on n’aurait pas compris, est dessinée, en briques rouges sur briques sable, la lettre « M ».
Un peu plus loin, ne ratez pas une sorte de passage secret qui vous ramène dans un parc. Vous passez sous les branches hautes et massives d’un magnifique marronnier avant d’emprunter la promenade de la Chocolaterie au bord d’un petit cours d’eau descendant des écluses qui retiennent plus haut l’eau de plusieurs lacs. On grimpe. Sous un joli soleil de printemps, au bord du chemin, on tombe sur un magnifique tapis de fleurs de couleur violette : lierre terrestre, lamier pourpre, muscari, violette (la bien nommée), trèfle pourpre, ruine-de-Rome et même, poussant comme une fleur sauvage, l’anémone blanda au beau violet vif.
Pause gourmande à Lognes, première ville asiatique de France et qui propose pléthore de restaurants de qualité
En haut, sur le territoire des communes de Torcy puis de Lognes, on longe une belle série de lacs. À Lognes justement se trouve une importante communauté asiatique. Fuyant leur pays dans les années 70-80, Vietnamiens, Laotiens ou Cambodgiens se sont installés dans ce coin de Seine-et-Marne où des logements étaient encore disponibles. C’est l’heure du déjeuner, on pousse la porte du New Saigon, ouvert depuis 40 ans et bénéficiant d’une solide réputation. Son bo bun est fameux. Parmi les entrées, on repère de la canne à sucre enrobée de farce de crevettes, ce qui nous change des classiques nems. En plat, notre voisin, un habitué, nous explique qu’il opte toujours pour une soupe. Mais, raffinement exquis, il les prend en deux bols : une « soupe sèche » avec ses nouilles et ses raviolis de crevettes d’un côté et le bouillon de l’autre. Info pour les becs sucrés : le dessert le plus populaire de ce restaurant à prix raisonnables s’appelle le « trois couleurs ». Il s’agit de gélatine claire, rouge et verte dans une concoction de jus de sucre de canne, châtaigne d’eau, de lait de coco et de glace pilée. À noter que notre palais a plutôt été pour.
Un peu moins vif après le déjeuner qu’avant, on suit le parcours, pas désagréablement. Un peu de bois, un peu de zone pavillonnaire. Peu avant la ligne d’arrivée, nous voilà devant un grand et bel ensemble de bâtiments en briques : la Ferme du Buisson, que la dynastie Menier- on avait failli les oublier!- a achetée et transformée dans les années 1880. Le lieu leur servait pour tester les innovations en agriculture comme les engrais et la sélection des espèces. Elle est aujourd’hui un centre culturel avec théâtre, cinéma, centre d’art et médiathèque.
Le RER du retour n’est pas loin. On s’y engouffre, fort d’une certitude : la prochaine fois qu’on fera un gâteau au chocolat, ce sera du Menier ou rien !
Infos pratiques : Balade en boucle au départ de la gare de Noisiel (RER A), avec un retour possible par la gare de Lognes (RER A). Parcours de 12 km. Le tracé est à retrouver ici. Pour plus d’informations sur la destination Paris – Vallée de la Marne, cliquez ici.
11 avril 2024 - Lorgnes
