Avouons-le : à la vue du baby-foot et de la table de ping-pong sortis devant ce grand hangar en briques rouges, on craint d’avoir encore à faire à l’une de ces friches où la mixité relève du voeu pieux, clamée par les instigateurs sans qu’elle soit au rendez-vous. Au moins, relève-t-on avec un brin de mauvais esprit, échappe-t-on aux sièges fabriqués en cagettes…
Et puis on se prend à regarder l’environnement. Situé sur la Petite ceinture ferroviaire à Paris, derrière la gare de Rosa Parks (19e), le TLM, ancien quai de chargement de la SNCF, se trouve à la lisière de deux univers : d’un côté des immeubles de bureaux flambants neufs qui ont poussé en même temps que la station de RER ; de l’autre la cité Curial-Cambrai : 17 tours dont 16 de 18 étages pour un total de près de 1800 logements. Pour le coup, en termes de mixité, la friche a clairement une carte à jouer et apparaît comme une couture bienfaisante entre deux territoires.
Directrice d’exploitation du site, Thaïs Bujalle-Latour en a bien conscience. Porté par le collectif Au fil du Rail – « un collectif d’associations locales et de structures parisiennes de l’économie sociale et solidaire »– le TLM ouvre jusqu’en septembre avant de refermer ses portes pour un an de travaux. Ensuite, le site demeurera actif un bon moment puisqu’un bail d’exploitation de 12 ans a été concédé à Au fil du Rail.
Un lieu tourné vers la mode, la culture et l’alimentation durable
Mais pourquoi ne pas choisir d’inaugurer les lieux seulement à la fin du chantier ? « Nous voulions ouvrir avant afin de faire participer les habitants à l’élaboration des lieux, explique Thaïs Bujalle-Latour. Faire des travaux et ouvrir ensuite, il nous semble que cela marche peu pour intégrer les gens à la démarche ». Des ambassadeurs de quartier ont déjà été mandatés pour inciter les voisins à investir l’endroit autour de trois thématiques : la mode, l’alimentation durable et la culture.
En attendant l’implantation de la Textilerie qui proposera une recyclerie, c’est pour l’instant Nafoor, à l’origine de la friperie P comme Prolétariat, qui occupe l’espace avec ses jupes à fleurs et ses bleus de travail à prix très abordables. Côté gastronomie, Mam’ Ayoka, restaurant d’insertion installé à la Halle Pajol (18e), a ouvert une annexe avec des plats à moins de dix euros comme un ceviche d’Equateur servi avec son riz sauvage et ses bananes plantain ou un chaulafan, une recette de riz au poulet frit également d’origine équatorienne. Dans la salle, les retraités du quartier partagent les lieux avec une bande de trentenaires qui travaillent visiblement juste à côté.
Côté culture, le TLM a déjà accueilli le Paname Comedy Club ainsi qu’une soirée scène ouverte. « Tous les projets sont les bienvenus« , souligne Thaïs Brujalle-Latour. Mais au fait, TLM, ça veut dire quoi ? « Transport Logistique Marchandises. Mais cet acronyme se prête à plein d’autres sens : Tout Le Monde, Tisser La Mixité… » Pour nous, ce sera Tiers-Lieu Malin.
Infos pratiques : Le TLM, entrée par le 97, rue Curial ou le 175, avenue de Flandres (puis avancer sur la petite ceinture), Paris (19e). Ouvert mercredi et dimanche de midi à 22h / les jeudis, vendredis et samedis de midi à minuit. Accès : métro Corentin Cariou (ligne 7) / gare Rosa Parks (RER E) / tramway T3b arrêt Rosa Parks. Plus d’infos sur Facebook et Instagram
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20 avril 2022 - Paris