« J’ai commencé à travailler sur la banlieue en 2009. C’était déjà quelques années après les émeutes à Clichy-sous-Bois mais ce sont bien elles qui m’ont poussée à réfléchir à la représentation de la banlieue dans les médias. Une représentation dans laquelle je ne me retrouvais pas : une banlieue sans cesse montrée du doigt pour sa violence et sa délinquance. Pour moi, qui ait grandi à Paris intra-muros mais qui n’ait découvert la banlieue qu’en devenant adulte, elle était au contraire remplie d’une énergie créative et constructive. D’une effervescence parfois difficile à canaliser, mais source d’inspiration et de construction pour notre société et dans laquelle nous devrions savoir puiser plus positivement. »
« Les ponts entre Paris et sa banlieue ne sont pas toujours facilement franchissables. Ou plutôt devrais-je dire les murs ; que ce soit dans un sens ou dans l’autre. Je ne sais pas ce qui me sidère le plus : les Parisiens qui n’osent pas franchir le périph’ ou les jeunes de banlieue qui ne s’autorisent pas à visiter Paris, ce monde si attirant et si inaccessible, aussi proche soit-il. »
« Si mon premier travail sur la banlieue est clairement non parisien, j’ai par la suite continué à documenter une banlieue où les ponts étaient plus évidents. J’ai voulu mettre en avant les préoccupations communes à cette mégapole qui se dessine, qu’on soit à l’intérieur ou à l’extérieur du périphérique. Comment vivre dans une ville plus humaine, plus nature, et plus riche de liens avec son voisin ? Si le Grand Paris peut servir à casser les frontières, et n’est pas qu’une machine à gentrifier les centres-villes, alors on sera gagnants. Si un jour on ne sait plus dire, en regardant mes photos et les gens qui les habitent, si l’on se trouve dans le Grand ou dans le petit Paris, alors la ville aura en effet réellement grandi. »
Les travaux de Jérômine Derigny sont à retrouver sur son site jeromine.com
A lire et à voir : Un oeil sur la banlieue avec le photographe Manolo Mylonas
24 avril 2018