Culture
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La friche culturelle Mains d’oeuvres expulsée à Saint-Ouen

Mains d'Oeuvres à Saint-Ouen / © Mains d'Oeuvres
Mains d’Oeuvres à Saint-Ouen / © Mains d’Oeuvres

Friche culturelle historique du Grand Paris, Mains d'Oeuvres, qui accueillait 250 artistes et employait 25 personnes, a fait l'objet d'une évacuation par les forces de l'ordre ce 8 octobre à Saint-Ouen.

Journée noire pour Mains d’Oeuvres à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), l’une des premières friches culturelles ouvertes en Île-de-France. Ce mardi 8 octobre au matin, les forces de l’ordre ont scellé les portes et fenêtres du bâtiment. Après des années de bataille juridique, la mairie a donc choisi d’expulser les 250 artistes et 25 salariés de la structure afin d’entamer une remise aux normes des locaux dans le but d’accueillir le conservatoire de musique de la ville, actuellement à l’étroit. “Depuis le départ nous avons proposé aux équipes du maire William Delannoy de collaborer ensemble sur ce projet mais il n’a jamais accepté de discuter avec nous. Nous avons donc de notre côté créé une école de musiques actuelles qui rassemble aujourd’hui 400 élèves au sein de Mains d’Oeuvres, indique Juliette Bompoint, directrice de la structure. Nous mettre à la rue de façon aussi violente et sans aucune proposition de relogement c’est de l’acharnement. Outre l’avenir de toute une équipe et des résidents, qui font vivre ce lieu depuis 20 ans, nous avons peur du véritable devenir de la structure. Au début de son mandat, le maire a décidé de vendre à BNP Paribas un autre bâtiment du quartier envisagé au départ pour reloger le conservatoire.” 

L’immeuble, qui appartient à la ville, faisait l’objet d’un bail qui s’est terminé le 31 décembre 2017.  L’association, sommée à plusieurs reprises de quitter les lieux, espérait gagner du temps jusqu’aux prochaines élections municipales en mars 2020. Mais, le 2 juillet dernier, le tribunal de grande instance de Bobigny, saisi par la mairie, ordonnait l’expulsion des occupants. Un jugement dont Mains d’oeuvres a fait appel et qui devait être examiné le 3 décembre. “Nous ne comprenons pas pourquoi William Delannoy n’a pas attendu cette date. Le sort de Mains d’Oeuvres sera un enjeu majeur des prochaines municipales, il n’y avait aucune urgence à les chasser comme cela dès maintenant. D’autant plus que le budget et les plans du futur conservatoire de musique n’ont pas encore été votés”, a confié Eric Coquerel, député France insoumise de la Seine-Saint-Denis et présent avec de nombreux autres élus au rassemblement qui s’est tenu ce 8 octobre devant Mains d’Oeuvres.

Mobilisation devant Mains d'Oeuvres mardi 8 octobre / © Mona Prudhomme pour Enlarge your Paris
Mobilisation devant Mains d’Oeuvres mardi 8 octobre / © Mona Prudhomme pour Enlarge your Paris

Un dialogue au point mort entre la mairie et l’association

Dans une double page consacrée au sujet dans l’édition de septembre du journal de la ville, le maire William Delannoy déclarait : « L’association Mains d’œuvres, en ne respectant pas ses engagements, a retardé de deux ans l’ouverture du nouveau conservatoire municipal, tout en exploitant financièrement ce bâtiment municipal de 4000 m² qu’elle occupe sans droit ni titre et sans reverser le moindre centime à la Ville, propriétaire des murs (…). Avec le futur conservatoire, le quartier retrouvera toute sa quiétude. » Ce à quoi l’association répond qu’elle n’a jamais refusé de payer le loyer et indique avoir proposé de racheter le bâtiment. Suite à l’incendie de 2010, qui avait ravagé une partie des locaux et conduit l’association à prendre en charge les travaux de réhabilitation, la justice avait acté le principe d’un loyer de 1 € symbolique, le temps que s’effectue la médiation sur l’avenir du lieu.

Alors que la pétition « Un nouveau bail pour Mains d’Oeuvre » a recueilli plus de 20.000 signatures sur change.org, une marche aura lieu ce mardi 8 octobre à 18h30 entre Mains d’Oeuvres et la mairie de Saint-Ouen.

A lire : L’interview de Fazette Bordage, fondatrice de Mains d’Oeuvres