Comment avez-vous eu l’idée de donner des appareils photo jetables à des Grand-Parisiens concernés par le chantier du Grand Paris Express à Bagneux ?
Juliette Paulet : Nous avions le choix entre deux thèmes proposés par la Société du Grand Paris (SGP) : les mutations du territoire et les chantiers. C’était évident pour moi d’aller vers les habitants pour récolter leur ressenti sur la métamorphose du quartier. C’est la responsable du chantier de Bagneux qui m’a suggéré les habitants à contacter, avec qui elle avait déjà des échanges. J’ai donné à chacun un appareil photo jetable en leur demandant de photographier le site comme ils le percevaient. Ils avaient seulement pour consigne de capter le chantier et la rue, et que moi je puisse venir leur tirer le portrait dans leur environnement. Comme tout projet d’école le temps imparti était très court. C’est moi qui ai sélectionné les photos exposées.
Comment les habitants se sont-ils appropriés la démarche ?
La SGP était surprise que j’ai pu accéder à leur intimité et qu’ils soient aussi enthousiastes de partager leur avis, sans forcément porter un jugement trop négatif. Entre l’excitation d’Antoine et l’appréhension de Laurence, deux visions s’opposent alors qu’ils vivent à 500 mètres l’un de l’autre. C’est incroyable de voir à quel point leurs images sont différentes. C’est la terre et la poussière dégagées qui les gênent le plus au quotidien. Laurence, qui est née ici et à garder l’appartement de ses parents, vit pile en face des travaux et est très attachée au quartier. Elle avait envie de se livrer et m’a raconté ses souvenirs d’enfant dans la tour démolie pour faire place à la future gare, et qu’elle regrette de ne plus voir depuis sa fenêtre. J’ai aussi eu la chance de rencontrer Guillaume qui lui n’habite pas Bagneux mais travaille sur le chantier. Sa vision est tout autre et permet des cadrages depuis l’intérieur du chantier.
En quoi ce travail a-t-il changé votre vision du Grand Paris ?
Je suis bretonne et lors du projet je n’étais à Paris que depuis un an donc très peu au fait de cet énorme projet du Grand Paris Express. Mise à part l’école Louis-Lumière qui est située à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), ce travail sur le chantier de Bagneux (Hauts-de-Seine) était ma première approche de la banlieue parisienne. Ce qui est sûr c’est qu’à présent je ne vois plus les chantiers de la même façon.
Infos pratiques : Exposition « Métro en vues » à la Fabrique du métro, 50 rue Ardoin, Parc des Docks (bâtiment 563, travées E et F), Saint-Ouen (93). Du 1er février au 30 avril. Accès libre lors des journées portes ouvertes : les samedis 2 février, 2 mars et 6 avril de 11h à 18h. Ou lors de visites guidées, du lundi au vendredi, sur inscription préalable via societedugrandparis.fr. Accès : Métro Mairie de Saint-Ouen Ligne 13 et Gare de Saint-Ouen RER C. Plus d’infos sur « Métro en vues » sur societedugrandparis.fr/metro-en-vues
« Une ville de la région parisienne. Les gens sont disciplinés, moyenne d’âge 50 ans, ils bossent, donc ça passe. Ils acceptent. Moi, j’aimerais pas habiter là. Y’a une différence entre être prévenu et le vivre », Guillaume Dupeux.
« Un petit parc, verdoyant d’arbres, dans lequel j’ai eu l’occasion de faire mes premiers matchs de foot, mes premières chutes à vélo, mes premières sorties entre copains », Antoine Pacquier
« Aujourd’hui tout le monde l’entend, le sent, le voit. On ne peut plus aller sur le balcon », Léonard Stauffert
« Je suis née ici, dans cet appartement. Il était à mes grands-parents. Bagneux, c’est sentimental pour moi. En face de ma fenêtre, il y avait une tour qui a été détruite. Elle structurait l’espace, j’avais l’habitude de la voir, avec les arbres aussi », Laurence Salun
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28 janvier 2019